L’enseignement du fait religieux et la sensibilisation à la liberté d’expression s’invitent au gré de l’actualité dans le débat public. Un débat qui touche aux idées de république et de laïcité. Un débat essentiel porté par les enseignants. Aurions-nous imaginé que c’est au risque de leur vie ?
Dans les années 1910, l’historien Marc Bloch est nommé professeur dans un lycée de Montpellier. Trente ans plus tard, pendant la Seconde Guerre mondiale, il rédige son Apologie pour l’histoire ou Métier d’historien où il se souvient du « brave proviseur » de ce lycée languedocien où il fit ses « premières armes de professeur ». Il se remémore « sa grosse voix de capitaine d’enseignement » qui l’avertissait : « Ici, le dix‑neuvième siècle, ce n’est pas bien dangereux. Mais quand vous toucherez aux guerres de religion, soyez très prudent. » Marc Bloch a‑t-il été prudent ? Peu de temps après la séparation des Églises et de l’État, parler de religion à l’école était un défi avec le risque d’avoir sur le dos les parents et les élèves, c’est-à-dire de nouveau les parents. Surtout, dans son Apologie pour l’histoire, Marc Bloch écrit : « Indispensable, cela va de soi, à une juste intelligence des phénomènes religieux actuels, la connaissance de leurs commencements ne suffit pas à les expliquer ». Il précise : « La question, en un mot, n’est plus de savoir si Jésus fut crucifié, puis ressuscité. Ce qu’il s’agit désormais de comprendre, c’est comment il se fait que tant d’hommes autour de nous croient à la Crucifixion et à la Résurrection ». Enseigner le fait religieux ? En histoire, en lettres, dans les sciences aussi quand il est question de l’origine de la vie, c’est une évidence. Ce qui l’est moins est que cet enseignement devienne dangereux, mortel.