La Comédie : histoire et formes

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Dès ses ori­gines, la comé­die a un rôle sub­ver­sif (désta­bi­li­sa­tion de l’ordre social) : comme le car­na­val, elle auto­rise pour un temps très court et dans un cadre bien pré­cis une grande liber­té, un brouillage des codes qui fondent habi­tuel­le­ment la socié­té. Dès ses ori­gines, elle a donc une por­tée cri­tique plus ou moins exploi­tée selon les époques.
Dans l’Antiquité, la comé­die naît des fêtes et du culte en l’honneur de Dionysos, dieu de l’i­vresse : tous les excès étaient alors per­mis. Nous devons les pre­mières comé­dies écrites au Grec ARISTOPHANE (IVème siècle avant J‑C) et, aux Romains PLAUTE et TÉRENCE (IIè siècle avant J‑C). Tous uti­lisent la comé­die pour dénon­cer la tyran­nie, le pou­voir de l’argent, la van­tar­dise.
Au Moyen Âge, la comé­die se rat­tache à la Fête des Fous pen­dant laquelle les éco­liers se ven­geaient de leurs maîtres en les ridi­cu­li­sant. C’est l’âge d’or de la farce, qui se carac­té­rise par un rythme tré­pi­dant, une ges­tuelle bouf­fonne (gifles, coups de bâtons, gri­maces, chutes…), un lan­gage fan­tai­siste (patois, jar­gons, bre­douille­ments), un comique gras.
À la Renaissance (XVIès.), se déve­loppe en Italie la Commedia dell’arte : cette forme de théâtre, héri­tée des farces du Moyen-Âge, repose sur la mise en scène de per­son­nages très typés par leur cos­tume et leur masque (Arlequin, Scaramouche, Polichinelle, Pierrot), qui impro­visent libre­ment à par­tir d’un cane­vas.
Le XVIIè siècle est l’âge d’or du théâtre : la comé­die s’en­ri­chit grâce à MOLIÈRE qui, tout en pui­sant dans l’héritage ita­lien, donne au genre ses lettres de noblesse : il crée la comé­die de mœurs (cri­tique des défauts d’un groupe social : Les pré­cieuses ridi­cules) et la comé­die de carac­tère (ridi­cu­li­sa­tion des vices d’un per­son­nage : L’Avare). La comédie-ballet est alors aussi très à la mode.
Au XVIIIème siècle où les inter­ro­ga­tions sur la socié­té et ses inéga­li­tés condui­ront fina­le­ment au ren­ver­se­ment de la Monarchie, la comé­die quant à elle s’affine : elle se centre sur l’individu, sa com­plexi­té, son iden­ti­té, et avec MARIVAUX et BEAUMARCHAIS elle s’o­riente vers l’a­na­lyse psy­cho­lo­gique : c’est la comé­die d’intrigue, qui s’intéresse notam­ment à la repré­sen­ta­tion de l’amour et emprunte cer­tains pro­cé­dés au roman (recon­nais­sance, dis­pa­ri­tion, sub­sti­tu­tion d’enfants, dégui­se­ments…).
À la fin du XIXème siècle, avec le triomphe de la bour­geoi­sie, on voit naître la comé­die de bou­le­vard, trans­po­si­tion sur le mode comique de la vie bour­geoise, et le vau­de­ville, qui pré­sente des intrigues enche­vê­trées tour­nant autour de l’a­dul­tère.
Au XXème siècle, la comé­die, comme tous les autres genres lit­té­raires, fait écho aux inter­ro­ga­tions exis­ten­tielles et elle se trouve pro­fon­dé­ment bou­le­ver­sée. On voit appa­raître un théâtre de l’ab­surde qui cherche à désta­bi­li­ser le spec­ta­teur ; la fron­tière entre comé­die et tra­gé­die est brouillée. Chez BECKETT ou IONESCO, farce et enfer­me­ment tra­gique sont inti­me­ment mêlés.


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