La Culture, c’est quoi, pour quoi ?

Temps de lec­ture : 5 minutes

● Nature vient du latin natus, né du verbe nas­cor, naître.
● Culture vient du verbe colere qui signi­fie « culti­ver » ou « honorer ».

Cicéron est le pre­mier a appli­quer le mot « culture » aux choses de l’esprit ou à l’âme (ani­mus) : « Un champ si fer­tile soit-il, ne peut être pro­duc­tif sans culture, et c’est la même chose pour l’âme sans ensei­gne­ment » (Tusculanes, II, 13).

Cette « culture de l’âme » est syno­nyme de ce que Cicéron appelle par ailleurs les « huma­ni­tas », cela même que les grecs appe­laient paie­deia, terme qui désigne « le trai­te­ment à appli­quer aux enfants pour qu’ils deviennent des hommes ».

La notion de culture implique un cer­tain tra­vail exer­cé sur une nature don­née, une trans­for­ma­tion de la nature sus­cep­tible de pro­duire des pro­prié­tés nou­velles ou, tout au moins de déve­lop­per des qua­li­tés d’abord vir­tuelles. C’est ainsi que la terre est culti­vée c’est-à-dire tra­vaillée, labou­rée, ense­men­cée pour pro­duire la récolte. C’est ainsi que les corps et les esprits peuvent être culti­vés, c’est-à-dire sou­mis à des exer­cices, à des appren­tis­sages divers afin de déve­lop­per leurs poten­tia­li­tés. Dans la langue fran­çaise cou­rante, le mot culture désigne sur­tout ce pro­ces­sus de for­ma­tion, de développement.

À par­tir du XVI° siècle, la culture cesse de dési­gner exclu­si­ve­ment le tra­vail des champs pour évo­quer, dans la pers­pec­tive de l’humanisme, le déve­lop­pe­ment des facul­tés men­tales grâce à des exer­cices appropriés.

Au XVIII° siècle le mot culture (Kultur en alle­mand) est employé – d’abord en Allemagne puis en France dans les écrits qui marquent le mou­ve­ment des Lumières – en concur­rence avec le mot civilisation.
Le mot désigne alors un pro­ces­sus inté­rieur de for­ma­tion, d’acquisition d’une dis­ci­pline, de matu­ra­tion intel­lec­tuelle et morale.

A. Définitions :

1. La culture, c’est ce qui s’ajoute à la nature. « LA culture » recouvre tout ce par quoi l’existence humaine appa­raît comme s’élevant au-dessus de la pure ani­ma­li­té, et plus géné­ra­le­ment tout ce qui élève l’homme au-dessus de la simple nature.
« La culture » qui carac­té­rise l’humanité peut être consi­dé­rée soit comme un état des facul­tés, soit comme un sys­tème de fonc­tions ou de pra­tiques, soit comme pro­ces­sus qui peut être étu­dié ou bien à l’échelle de l’individu ou bien à celle de l’humanité.
Généralement on oppose la nature et la culture pour dis­tin­guer ce qui est inné de ce qui est acquis. Mais cette oppo­si­tion est loin d’être aussi claire qu’il n’y paraît.
Tandis que la nature d’un être se trans­met par héré­di­té, la culture se trans­met par héri­tage. La culture désigne les atti­tudes, les croyances, les mœurs, les valeurs acquises et trans­mises par l’éducation.

2. Lorsqu’on parle d’un « homme culti­vé », la culture désigne le résul­tat d’un pro­ces­sus de réa­li­sa­tion de l’individu
À la dif­fé­rence du sens 1, on consi­dère ici la réa­li­sa­tion intel­lec­tuelle et morale du sujet par l’exercice et le déve­lop­pe­ment des facul­tés de l’esprit.
La culture désigne donc ici le pro­ces­sus uni­fié d’éducation et de for­ma­tion de l’esprit humain qui nous donne accès à l’immensité des choses faites ou vécues par les hommes (à la culture au sens 1), ainsi qu’au reste du monde natu­rel. Cette édu­ca­tion s’effectue par la fré­quen­ta­tion des sciences et des œuvres de l’esprit (l’art, la poé­sie, la lit­té­ra­ture, la pen­sée concep­tuelle, que ce soit la phi­lo­so­phie ou la science).

3. Depuis la fin du XIX° siècle il est deve­nu cou­rant de dési­gner sous l’expression mot « une culture » la manière déter­mi­née dont une popu­la­tion don­née, prise à un moment de son his­toire, réa­lise LA culture au sens 1.
On carac­té­rise donc « une culture » par tout un ensemble d’habitudes et de repré­sen­ta­tions men­tales, consti­tuant les unes par rap­port aux autres, un sys­tème ori­gi­nal et se com­mu­ni­quant de manière inva­riable à tous les membres d’une cer­taine popu­la­tion. La culture d’une socié­té don­née inclu­ra la tota­li­té des cou­tumes, des lois, des croyances, des formes d’art, de lan­gage et de pen­sée, d’une société.

● Il faut remar­quer que même si la culture a pour sujets immé­diats les indi­vi­dus, elle ne peut s’accomplir qu’à tra­vers une enti­té sociale et poli­tique. Dans un sens socio­lo­gique qui vient de l’allemand Kultur, on enten­dra par culture non plus le pro­ces­sus de for­ma­tion, mais les ins­ti­tu­tions elles-mêmes, les valeurs, les modèles de com­por­te­ment qui, dans telle socié­té don­née, par­ti­cipent à la for­ma­tion des indi­vi­dus. Le mot culture devient syno­nyme du terme civi­li­sa­tion. La culture se défi­nit alors comme « le mode de vie d’une socié­té », c’est-à-dire un ensemble de faits sociaux, de carac­té­ris­tiques propres à un groupe.

L’ethnologue amé­ri­caine Margaret Mead écrit que la culture est « l’ensemble des formes de com­por­te­ment d’un groupe d’individus, unis par une tra­di­tion com­mune, trans­mise par l’éducation ». La manière de laver la vais­selle, de faire la cui­sine, de cou­cher les bébés, la façon de dési­gner le chef du gou­ver­ne­ment, tout cela fait par­tie de la culture.

B. Problème : L’ethnocentrisme et la diver­si­té des cultures

Si la culture désigne tous les modes col­lec­tifs d’existence d’une socié­té quel­conque (défi­ni­tion 3) , cela signi­fie qu’il n’y a pas de socié­té humaine « inculte », dépour­vue de culture. Il n’y pas d’un côté les « civi­li­sés » et de l’autre « les sau­vages » ou les « bar­bares », mais des cultures ou des civi­li­sa­tions différentes.

1) L’ethnocentrisme – Cependant chaque socié­té a tou­jours eu ten­dance à confondre « sa » propre culture ou civi­li­sa­tion avec « LA » culture ou civi­li­sa­tion, allant jusqu’à reje­ter hors de l’humanité les hommes qui appar­tiennent à d’autres cultures.
« Derrière ces épi­thètes [« sau­vages », « bar­bare »] se dis­si­mulent un même juge­ment ; il est pro­bable que le mot bar­bare se réfère éty­mo­lo­gi­que­ment à la confu­sion et à l’inarticulation du chant des oiseaux, oppo­sées à la valeur signi­fiante du lan­gage humain ; et sau­vage, qui veut dire « de la forêt », évoque aussi un genre de vie ani­mal, par oppo­si­tion à la culture humaine. Dans les deux cas on refuse d’admettre le fait même de la diver­si­té cultu­relle. On pré­fère reje­ter hors de l culture, dans la nature, tout ce qui ne se conforme pas à la norme sous laquelle on vit. » Claude Lévi-Strauss, Race et histoire

2) La diver­si­té des cultures est une carac­té­ris­tique spé­ci­fique à l’homme. Tandis que les ani­maux d’une espèce ont approxi­ma­ti­ve­ment des mœurs iden­tiques, le trait carac­té­ris­tique de l’espèce humaine réside pré­ci­sé­ment dans les dif­fé­rences consi­dé­rable qui existent d’une culture à une autre. Par son apti­tude aux extrêmes diver­si­tés cultu­relles, l’homme, dans ce qu’il a de spé­ci­fi­que­ment humain, semble se défi­nir sur un plan qui n’est plus celui de la nature.

Tous les êtres vivants sont sou­mis à l’évolution qui trans­forme très len­te­ment les espèces au cours de mil­lions d’années, mais seul l’homme a une his­toire car il est le seul parmi toutes les espèces vivantes à être à la fois un inven­teur et un héri­tier de culture : L’homme crée des langues, des outils, des reli­gions, des œuvres d’art, trans­met­tant d’abord par la parole, puis dans les der­niers mil­lé­naires, par l’écriture, ce patri­moine aux géné­ra­tions sui­vantes qui pour­ront exer­cer à leur tour leur facul­té d’invention dans le cadre de ce qu’elles ont reçu.

Dans ces condi­tions, le sys­tème des valeurs, des règles sociales, des conduites apprises dans chaque groupe social est le résul­tat d’une longue suc­ces­sion d’inventions et d’héritages. Et il y autant de cultures qu’il y a de groupes dis­tincts. Tandis que ce qui est uni­ver­sel, propre à tous les hommes, révèle leur nature et porte la marque de constantes bio­lo­giques, tout ce qui appar­tient à la culture porte la marque du divers et du rela­tif : il y a plu­sieurs reli­gions, plu­sieurs formes d’art, plu­sieurs sys­tèmes poli­tiques. Les lois natu­relles appar­tiennent à la moda­li­té du néces­saire : on ne sau­rait s’y sous­traire, elles sont uni­ver­selles. Par contre, les règles sociales et cultu­relles sont contin­gentes. Elles varient selon les civi­li­sa­tions. Ce sont des règles édic­tées par le groupe et il arrive que l’individu leur désobéisse.

source : http://​www​.aline​-louang​van​na​sy​.org/​a​r​t​i​c​l​e​-​c​o​u​r​s​-​l​a​-​c​u​l​t​u​r​e​-​1​1​6​5​4​0​0​2​7.html

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