La Nature doit-elle avoir un prix pour mieux la protéger ?

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Alors qu’une sixième extinc­tion de masse appa­raît, com­ment éco­no­mie et pro­tec­tion de l’en­vi­ron­ne­ment peuvent-elles inter­agir ? Peut-on mesu­rer l’im­pact éco­no­mique d’une forêt qui brûle, ou d’une marée noire ? Comment cal­cu­ler ce que vaut le vivant ? La nature a‑t-elle un coût ?

Comment inté­res­ser la poli­tique au désastre envi­ron­ne­men­tal qui s’ac­cen­tue ? Catherine Aubertin explique le prin­cipe du ser­vice éco­sys­té­mique : “Pour défendre la nature, ils ont créé la notion de ser­vice éco­sys­té­mique. C’est tout les ser­vices que la nature peut rendre aux popu­la­tions. Cela peut être le fait de pro­duire de la nour­ri­ture par exemple. Les éco­lo­gistes ont créé ce concept pour inté­res­ser les poli­tiques. C’est désor­mais la logique du pollueur-payeur qui se met en place…”

Un de ces moyens consiste, comme cela a été pensé pour la ques­tion cli­ma­tique, à don­ner un prix, ou une valeur, à la nature. Les éco­lo­gistes comme les éco­no­mistes sont divi­sés sur la néces­si­té de suivre cette logique.

Hélène Tordjman redoute que ces mesures ne soient pas suf­fi­santes : “On uti­lise des méthodes d’é­va­lua­tion envi­ron­ne­men­tales uti­li­sées pour la déci­sion publique, dans la construc­tion de bar­rage par exemple. Ce sont des cal­culs coût/avantage. On a géné­ra­li­sé ces méthodes pour don­ner des valeurs aux zones humides, ou aux récifs cora­liens par exemple… Sur le fond, il nous faut chan­ger radi­ca­le­ment de sys­tème. Ce n’est pas ces esti­ma­tions qui vont nous per­mettre de chan­ger. Il faut sor­tir de cette posi­tion d’anthropocentrisme.”

Pour Gilles Kleitz, il ne s’a­git pas seule­ment de don­ner un prix à la nature : “Il faut bien dis­tin­guer le prix d’un ins­tru­ment de valeur d’é­change, et la valeur comme une ten­ta­tive de défi­nir ce qu’est la nature… Il faut mettre un prix sur ce qu’on détruit, sinon ce n’est pas pris en compte. Le pro­blème de la finan­cia­ri­sa­tion c’est qu’on confond l’ins­tru­ment dont on a besoin, avec le fond.”

Bien inten­tion­née, la dénon­cia­tion de la vio­lence se contente cepen­dant sou­vent d’arguments sim­plistes, dont il n’est pas cer­tain qu’on puisse se satis­faire. Le sen­ti­ment d’effroi que la vio­lence ins­pire ne peut évi­dem­ment pas suf­fire, puisqu’on pour­rait aus­si­tôt lui oppo­ser le plai­sir que son exer­cice pro­cure. Souvent, on appuie cette condam­na­tion sur ce pos­tu­lat : la vio­lence serait d’origine natu­relle. Et de ce pos­tu­lat on déduit qu’elle ne peut être com­bat­tue que par la culture, qui serait son anti­thèse. Une telle affir­ma­tion devrait pous­ser à consi­dé­rer que les ani­maux sont par essence vio­lents ; pour­tant, nous savons bien que ce serait faire un usage dépla­cé de ce concept, dans la mesure où ils sem­ble­raient plu­tôt carac­té­ri­sés par la bru­ta­li­té. En effet, leur com­por­te­ment, dénué de toute inten­tion et de toute valeur, est le résul­tat d’une pul­sion de vie s’accomplissant à l’état brut. Nous savons bien que l’homme ne peut être réduit à un tel méca­nisme ; dès lors, il est néces­saire de se deman­der si la william-klein1violence n’est pas, déjà, une mise en œuvre cultu­relle de cette bru­ta­li­té natu­relle. Mais si on met­tait cela en évi­dence, il fau­drait alors se deman­der si on peut per­sis­ter à voir dans la culture un rem­part qui nous pro­té­ge­rait de la vio­lence ou s’il ne faut pas, plu­tôt, la consi­dé­rer comme cet espace au sein duquel la vio­lence appa­raît, et croît ; en d’autres termes, on peut se deman­der si la culture nous pro­tège véri­ta­ble­ment de la vio­lence. Et c’est au prix d’une telle réflexion, en confron­tant la thèse d’une vio­lence natu­relle à celle d’une vio­lence qui serait le pro­duit de la culture, qu’on pour­ra effi­ca­ce­ment entre­prendre de lut­ter contre la vio­lence, avec les bons argu­ments et les bons outils.

Le plus simple, pour­lé­gi­ti­mer la vio­lence, c’est d’en obser­ver la per­ma­nence : La vio­lence est uni­ver­selle, cha­cun en est poten­tiel­le­ment l’auteur et s’en éloi­gner réclame des efforts qui imposent de se cou­per du plai­sir que son accom­plis­se­ment pro­voque, efforts que nous ne sommes pas tou­jours dis­po­sés à mettre en œuvre. Mais pour mieux le com­prendre, sans doute faut-il pré­ci­ser ce que nous enten­dons par « vio­lence ». Les illus­tra­tions en sont mul­tiples, et c’est en cher­chant leur déno­mi­na­teur com­mun qu’on peut cer­ner ce dont on parle ici : dans la vio­lence, il est tou­jours ques­tion de la mise en œuvre d’une force qui aurait pour objet un autre être humain, qu’il s’agirait de contraindre à sa propre volon­té. L’observation des ani­maux peut lais­ser pen­ser qu’il s’agit là, chez l’homme, de l’expression des rap­ports de force qui sont déjà à l’œuvre dans la nature. Après tout, on pense volon­tiers qu’y règne la « loi du plus fort », que la sélec­tion natu­relle asser­vit les êtres les plus faibles aux plus puis­sants, et que la fai­blesse est une tare dont il est bon, pour l’espèce, de l’en débarrasser.

C’est l’observation des rap­ports natu­rel­le­ment « vio­lents » entre les hommes, à l’image du rap­port qu’entretiennent les indi­vi­dus dans le règne ani­mal, qui a servi de fon­de­ment à la légi­ti­mi­té de pou­voirs poli­tiques ins­ti­tuant des lois s’imposant, par la force, à des humains trop sou­vent enclins à ne pas leur obéir. Et c’est sans doute chez Thomas Hobbes qu’on trouve le plus clai­re­ment mis en œuvre un tel rai­son­ne­ment. C’est en effet à ce pen­seur qu’on doit cette com­pa­rai­son entre l’homme et l’animal, dont on ne sait lequel des deux elle humi­lie le plus : l’homme serait « un loup pour l’homme ». Ce que Hobbes veut éta­blir en syn­thé­ti­sant son pro­pos dans une telle for­mule, c’est qu’il y a, de façon innée, chez l’homme, une hos­ti­li­té qui lève chaque être humain contre tous les autres, dans un guerre per­ma­nente pour des objets qui sont convoi­té de tous, et ne peuvent béné­fi­cier qu’à quelques uns. Cet ins­tinct égo­cen­trique serait tel­le­ment puis­sant qu’il légi­ti­me­rait l’instauration d’un pou­voir poli­tique fort, tota­li­taire, parce que la seule rati­fi­ca­tion d’un contrat rai­son­nable entre les hommes ne suf­fi­rait pas à éra­di­quer cette vio­lence géné­ra­li­sée, et seul un pou­voir concen­trant entre ses mains une telle puis­sance des­truc­trice, et seul apte à en faire usage, par­vien­drait à en faire res­pec­ter les termes. C’est là le grand argu­ment de tous ceux qui s’opposent aux thèses anar­chistes : nulle socié­té ne sur­vi­vrait dura­ble­ment à la dis­pa­ri­tion des lois qui la tiennent, parce qu’alors on retom­be­rait dans cet abo­mi­nable état de nature dans lequel Hobbes voit « la guerre de tous contre tous ». Un film tel que American Nightmare (The Purge en ver­sion ori­gi­nale), s’appuie sur un pré­sup­po­sé identique.

On ne s’étonnera pas, dès lors, de voir cer­tains pen­seurs, par­ti­cu­liè­re­ment cri­tiques envers le pou­voir exer­cé par l’Etat sur les indi­vi­dus, rééva­luer ces forces pro­fondes et appe­ler l’homme à atti­ser en lui les braises de cette force dont le pou­voir poli­tique le prive. On peut trou­ver en par­ti­cu­lier chez Nietzsche une telle nos­tal­gie des temps au cours des­quels la rai­son n’avait pas encore enca­dré à ce point la vie. Et si Nietzsche voyait en l’Etat « le plus froid de tous les monstres froids », ce n’est pas parce qu’il en condam­nait la vio­lence en elle-même, celle par laquelle l’ordre est main­te­nu, mais bien parce que cette puis­sance d’affirmation est volée à l’individu qui perd là sa propre puis­sance de vie, sa volon­té. Nietzsche n’est pas dupe de la vio­lence qu’implique l’exercice, en soi, de la vie véri­table, la créa­tion d’une vie qui serait, de part en part, volon­taire, l’exigence d’une liber­té consis­tant, non pas à « faire ce qu’on veut », mais à « vou­loir ce qu’on fait ». Et sans doute est-ce ce qui fait le dan­ger poten­tiel d’une telle pen­sée. Mais cette conscience est telle, chez Nietzsche, qu’il sait bien qu’une telle vie se devrait d’être soli­taire, le risque étant trop grand de voir cette puis­sance prendre les autres pour cible, quand elle ne doit, en fait, s’appliquer qu’à soi-même. Une phi­lo­so­phie qui célèbre l’effort peut trop faci­le­ment se trans­for­mer en une idéo­lo­gie de la domi­na­tion. Sans remettre en ques­tion les thèses de cet auteur, il est donc pos­sible de consi­dé­rer que, repé­rer dans cette puis­sance natu­relle, dont l’Etat nous a muti­lés, les condi­tions de la vie véri­table, c’est aussi y recon­naître la source d’une vio­lence poten­tielle dont on peut craindre, si rien ne l’arrête, qu’elle œuvre contre le pro­jet qu’elle est cen­sée ser­vir. L’Etat serait donc le mal néces­saire, char­gé d’organiser une vio­lence concen­trée pour en évi­ter la néces­saire et natu­relle dis­sé­mi­na­tion universelle.

Ainsi, ce serait bien dans la nature qu’il fau­drait cher­cher les racines de la vio­lence, et dès lors, l’homme seul, puisque seul apte à dépas­ser la nature, à s’opposer à celle-ci en fai­sant d’elle ce qu’elle n’est pas d’elle-même, pour­rait contrer la vio­lence et his­ser le monde vers la paix. Cependant, une telle affir­ma­tion ne résis­te­rait pas à l’épreuve des faits : sans for­cé­ment affir­mer que les temps anciens étaient plus pai­sibles, on ne constate pas que la vio­lence dis­pa­raisse au fur et à mesure de l’avancée de l’humanité sur le fil de sa propre his­toire. Pire : les moyens mis en œuvre par l’homme étant désor­mais indus­triels, la vio­lence use elle aussi des ces moyens et on voit appa­raître au fil des siècles un exer­cice de la vio­lence qui la sys­té­ma­tise, qui la pro­duit en chaine, qui l’industrialise en somme. Progresser dans le domaine de la culture ne semble donc pas consti­tuer un rem­part effi­cace contre la vio­lence. On peut même dire que cela semble lui appor­ter une puis­sance nou­velle. Plus pro­fon­dé­ment encore, on pour­rait soup­çon­ner que la vio­lence soit, en fait, le pro­duit même de la culture humaine.

Commençons par éli­mi­ner un soup­çon que nous avons pu entre­te­nir : quand nous consi­dé­rons que l’homme est par nature mau­vais, qu’il est natu­rel­le­ment enclin à la vio­lence, nous fai­sons mine de pen­ser que tout acte d’éducation consis­tant à contraindre son com­por­te­ment à ne plus faire preuve de ces mau­vaises ten­dances est un acte cultu­rel visant à éra­di­quer en l’homme cette pro­pen­sion natu­relle à la vio­lence. On cite volon­tiers Freud pour sou­te­nir ce genre de thèse, en espé­rant mon­trer ainsi à quel point les pul­sions pri­mi­tives sont dan­ge­reuses, et à quel point elles rendent néces­saire une édu­ca­tion un peu mus­clée. Pourtant, dans les mots même de Freud, ce n’est pas ainsi que ces phé­no­mènes sont décrits. Prenons une phrase en par­ti­cu­lier, dans un texte inti­tu­lé l’Intérêt de la psy­cha­na­lyse, publié en 1913 : « Une vio­lente répres­sion d’instincts puis­sants, exer­cée de l’extérieur, n’apporte jamais pour résul­tat l’extinction ni la domi­na­tion de ceux-ci, mais occa­sionne un refou­le­ment qui ins­talle la pro­pen­sion à entrer ulté­rieu­re­ment dans la névrose. » Si on observe bien la répar­ti­tion freu­dienne des rôles, du côté des ins­tincts pre­miers, on parle de puis­sance. Et du côté de l’éducation, donc de la culture, on parle bel et bien de vio­lence. Ajoutons ceci, même : la culture est cré­di­tée d’une double vio­lence, celle qu’elle met en œuvre (la répres­sion, les inter­dits, les sévices), mais aussi celle qu’elle pro­duit (la névrose, qui est défi­nie plus loin comme une muti­la­tion : un « pré­ju­dice de la capa­ci­té d’agir et de la capa­ci­té de jouir », des mots qu’on pour­rait tout à fait croire appli­quer à une pra­tique telle que l’excision, en fait). Il ne s’agit pas d’affirmer que Freud encou­rage à lais­ser les pul­sions s’accomplir telles quelles. Mais il ne les défi­nit pas comme vio­lentes. En fait, elles sont en elles-mêmes neutres, et sont pour lui l’humus de nos meilleures ver­tus. Si elles sont neutres, et si la culture est elle-même capable de vio­lence, même si c’est avec les meilleures inten­tions du monde, c’est que la vio­lence n’est pas natu­relle. Elle désigne un type de phé­no­mène qui n’a lieu, ou qui n’est recon­nais­sable que dans le milieu par­ti­cu­lier qu’est la culture.

Ainsi, on peut se deman­der si ce n’est pas un dis­cours bour­geois que d’identifier la vio­lence à la « nature », pré­ten­dant dès lors que ce sont les hommes les plus culti­vés, c’est-à-dire, dans les faits tels que la bour­geoi­sie les orga­nise, les plus favo­ri­sés éco­no­mi­que­ment, qui sont aussi les moins sujets à la vio­lence. D’ailleurs, sur le ter­rain poli­tique, quand on lit Rousseau et son ana­lyse des sources des inéga­li­tés et de la ten­sion appa­rem­ment natu­relle qui ins­taure ce conflit géné­ra­li­sé entre les hommes, on s’aperçoit que c’est dans la vie sociale elle-même qu’il iden­ti­fie la nais­sance de la vio­lence. On peut pen­ser que l’accaparement qui a lieu dans la nature, pour pré­ser­ver ses propres chances de sur­vie, est une vio­lence. Mais cet acca­pa­re­ment ne vient pas d’un mou­ve­ment spon­ta­né qui serait par nature ins­crit dans l’homme, il est plu­tôt dû aux condi­tions de vie de l’être humain, à la pro­mis­cui­té dans laquelle il se trouve, et à la rare­té des biens qu’il vise. L’illusion consis­te­rait à pen­ser que l’instauration des lois, en fai­sant pas­ser l’humanité de l’ère de la pos­ses­sion (l’objet m’appartient parce que je l’ai dans la main et per­sonne n’osera me le prendre) à la pro­prié­té (l’objet m’appartient parce que les ins­ti­tu­tions sont témoin de ce lien exclu­sif qui existe en lui et moi) soit un pas­sage de la vio­lence natu­relle à la paix sociale. La pro­prié­té est, elle-même, une forme de vio­lence dès lors qu’elle confronte ceux qui ont à ceux qui n’ont pas, dès lors qu’elle per­met à ceux qui ont, d’avoir un quel­conque pou­voir (ne serait-ce que de sub­ju­ga­tion, ou de fas­ci­na­tion) sur ceux qui n’ont pas. Il suf­fit, pour le sai­sir, de lais­ser le charme par­ti­cu­lier des slo­gans publi­ci­taires agir, tout par­ti­cu­liè­re­ment un des plus connus : « Si vous n’avez pas un iphone, vous n’avez pas un iphone ». Tout le monde com­prend bien que, s’il s’agit de dire quelque chose qui soit sim­ple­ment vrai, alors cette phrase décrit, en effet, la réa­li­té de l’inégalité éco­no­mique : cer­tains font par­tie de ceux qui ont les moyens de s’acheter un tel équi­pe­ment, dont tout le monde sait qu’il coûte très cher, et d’autres n’en ont pas les moyens. Mais cet énon­cé va plus loin, et tout le monde le com­prend très bien : il s’agit de nar­guer ceux qui ne l’ont pas, en fai­sant du simple fait de faire par­tie des happy-few qui peuvent se per­mettre de le pos­sé­der, un motif de l’acheter. En somme, il s’agit de faire de l’objet un signal lancé à ceux qui ne peuvent pas le pos­sé­der, ne les invi­tant pas à entrer dans ce club éli­tiste, mais leur rap­pe­lant le fait qu’ils n’y sont pas conviés, afin de géné­rer en eux une frus­tra­tion telle qu’ils se sen­ti­ront d’autant plus atti­rés par cet objet qu’il leur est, a prio­ri, refu­sé. Ils accep­te­ront alors d’autant mieux d’effectuer une dépense dont ils n’ont, en fait, pas les moyens. Si la vio­lence consiste à uti­li­ser autrui comme moyen de sa propre satis­fac­tion, contre sa propre volon­té, alors un tel dis­cours relève de la vio­lence, puisqu’il joue sur la modes­tie contrainte du pou­voir d’achat des plus pauvres pour per­mettre aux plus riches de jouir de leur domi­na­tion, en la cla­mant haut et fort, de façon soi-disant valo­ri­sante. Or, les stra­té­gies de com­mu­ni­ca­tion des marques les plus implan­tées dans les fan­tasmes bour­geois ne relèvent pas de la nature, on y voit plu­tôt des élé­ments par­ti­cu­liè­re­ment per­ti­nents, aigui­sés, malins, de la culture, qu’on est même tenté d’applaudir en par­faite connais­sance de cause.

Pour autant, les publi­ci­tés bour­geoises ne sont pas bru­tales. Elles ne consistent pas à éli­mi­ner phy­si­que­ment ceux qu’elle juge indé­si­rables. Et même si cette éli­mi­na­tion peut être, pour la bour­geoi­sie, une volon­té pro­fonde, elle est obli­gée de lui don­ner des formes, (ce qui ne signi­fie pas qu’elle l’éradique). Ainsi, la vio­lence des rap­ports entre couches sociales est, déjà, une trans­for­ma­tion cultu­relle de la bru­ta­li­té natu­relle. Elle amène donc du sens à ce qui, sinon, n’est qu’accomplissement aveugle de la puis­sance de vie. Elle per­met donc de recon­naître comme inac­cep­table ce qui, sinon, pas­se­rait inaper­çu. Après tout, la domi­na­tion est un fait de nature, comme on l’a mon­tré plus tôt. Mais la domi­na­tion entre êtres humains prend des formes qu’on ne trouve pas dans la nature, pré­ci­sé­ment parce qu’elle ne passe pas inaper­çue. C’est ce qui inter­dit de réduire la vio­lence à un simple jeu de forces natu­relles. Et c’est ce qui invite à n’utiliser le concept de vio­lence que dans un cadre stric­te­ment humain, et donc un cadre cultu­rel. C’est par exemple la thèse de Karl Marx, lorsqu’avec Engels, ils diag­nos­tiquent dans les pre­mières lignes du Manifeste du parti com­mu­niste, la struc­ture per­ma­nente des rela­tions entre classes sociales, à tra­vers les âges, de l’esclavage au capi­ta­lisme : ils montrent en fait qu’il y a une vio­lence constante dans ce rap­port, qui orga­nise de façons cultu­rel­le­ment diverses la domi­na­tion de cer­tains êtres humains sur d’autres êtres humains. Ce fai­sant, ils montrent que la culture n’a pas pour but d’éradiquer la vio­lence. Au contraire, elle lui donne une forme, de façon à rendre ce rap­port de force admis­sible. En d’autres termes, elle l’institue. Ce fai­sant, pour Marx, la révo­lu­tion, si elle est de l’ordre de la vio­lence, ne peut cepen­dant pas être condam­née pour cette rai­son, car elle n’est pas une vio­lence pri­mi­tive qui vien­drait détruire le bel édi­fice paci­fié que serait la socié­té culti­vée. C’est vio­lence contre vio­lence, forme culti­vée contre forme culti­vée. On retrou­ve­ra cette idée chez Georges Sorel, quand il iden­ti­fie­ra la révo­lu­tion comme un moment de néces­saire vio­lence, néces­si­té qui n’est pas celle de la nature brute, puisqu’elle est en réa­li­té le pro­duit d’une vio­lence préa­lable, qui est celle de la struc­ture sociale bour­geoise elle-même, qui se pré­sente elle-même comme émi­nem­ment culti­vée. Si, alors, il fal­lait voir en la nature une apti­tude à la vio­lence, ce ne serait que dans la mesure où la culture est, pour l’homme, natu­relle. Mais alors, en renon­çant à l’opposition entre nature et culture, il fau­drait renon­cer à voir l’une nous pro­té­ger de l’autre.

On com­prend dès lors à quel point il semble peu per­ti­nent de cher­cher dans la culture un bou­clier effi­cace contre la vio­lence, puisque fina­le­ment, sans culture, la vio­lence n’aurait aucune exis­tence recon­nue, étant réduite à sa forme natu­relle, neutre, qu’est la bru­ta­li­té. Pour autant, on com­prend dès lors mieux le para­doxe inhé­rent à ce phé­no­mène qu’on appelle « vio­lence » : si la culture est le milieu dans lequel la vio­lence prend racine, la culture est aussi ce qui per­met de la recon­naître, est c’est là une condi­tion néces­saire au com­bat qui la prend pour cible. Dès lors, sans doute ne faut-il pas se tour­ner vers la culture pour éra­di­quer la vio­lence, néan­moins, on peut sup­po­ser qu’on puisse se tour­ner vers elle pour en répondre.

Un détail, dans la manière dont les athé­niens contaient la nais­sance de leur propre cité, peut nous aider à com­prendre dans quelle mesure on peut conce­voir la vio­lence comme par­tie pre­nante de la culture, tout en consi­dé­rant celle-ci comme une pro­tec­tion effi­cace – mais pour des rai­sons jusque là insoup­çon­née – contre la vio­lence. Après tout, comme le disait Nietzsche, ce qui ne nous tue pas peut nous rendre plus forts. Selon les mythes fon­da­teurs d’Athènes, deux divi­ni­tés auraient, en quelque sorte, pro­po­sé leurs ser­vices tuté­laires à la cité, sous la forme de pré­sents cen­sés séduire les athé­niens. Poséidon fut le pre­mier à pro­po­ser ses ser­vices, en offrant à Athènes un che­val fan­tas­tique, que la ville reçut comme une véri­table arme de guerre, por­teuse des valeurs de cou­rage, d’aptitude à la des­truc­tion, de force en somme. Athéna, elle offrit au peuple un oli­vier, plan­té sur l’Acropole, sym­bole de sagesse et de paix. Alors qu’ils devaient choi­sir entre les deux pré­sents divins, les athé­niens voyaient dans le che­val une pro­messe de très grandes richesses, dont ils ne seraient cepen­dant jamais cer­tains de les conser­ver. Ils pré­fé­rèrent donc Athéna, car si les biens acquis par la sagesse et la paix sont plus modestes, ils sont aussi plus fer­me­ment acquis. De ce mythe fon­da­teur, on pour­rait tirer la conclu­sion qu’Athènes avait déjà tour­né le dos à la vio­lence, pour confier son ave­nir à la seule ins­pi­ra­tion de la sagesse, qu’on devine ici paci­fique. Mais en fait, pour qui connait un peu plus inti­me­ment la déesse Athéna, on sait que si elle est déesse de la sagesse, elle l’est aussi de la guerre. Elle n’est donc pas étran­gère à la vio­lence, puisqu’elle est sus­cep­tible de l’inspirer. Mais faut-il pour autant voir en elle une syn­thèse qui inté­gre­rait la puis­sance de Poséidon, ce qui signi­fie­rait qu’en réa­li­té, les athé­niens n’auraient pas vrai­ment choi­si entre ces deux figures tuté­laires, et auraient sur­tout été malins en pre­nant ce que cha­cun avait à pro­po­ser, choi­sis­sant Athéna sans écon­duire Poséidon ? En fait, ce n’est pas tout à fait ainsi que le choix est effec­tué. En effet, la guerre incar­née par Athéna n’est pas la puis­sance de feu que repré­sente Poséidon. Celui-ci, divi­ni­té de l’univers marin, étend son pou­voir sur les forces natu­relles, poten­tiel­le­ment des­truc­trices, en dehors même des inten­tions humaines. Si la guerre ne fait pas par­tie de ses pré­ro­ga­tives, c’est qu’elle n’est pas consi­dé­rée comme rele­vant des forces natu­relles agis­sant pour elles-mêmes, aveu­glé­ment. La guerre n’a rien d’aveugle parce qu’elle est, de part en part, décla­rée, menée, et rom­pue par les hommes. A la dif­fé­rence du déclen­che­ment des cata­clysmes natu­rels, elle est ce qui peut être, ou ne pas être, elle est donc contin­gente, et par consé­quent, libre. On com­prend mieux dès lors pour­quoi Athéna se trouve être simul­ta­né­ment déesse de la sagesse et de la guerre : si la guerre relève de ce dont l’homme décide, alors elle néces­site d’être subor­don­née aux qua­li­tés qu’on attend d’un homme sage. Sinon, elle n’est que cet état d’opposition et de concur­rence per­ma­nentes dans lequel se trouvent tous les êtres, humains ou non, dans la nature. Or on peut se deman­der si dési­gner un tel état comme une guerre, comme le fait Hobbes, est bien per­ti­nent : invo­lon­taire, non décla­ré, presque incons­cient, jamais ache­vé, cet état relève plu­tôt de la bru­ta­li­té des pul­sions de vie, qui ne peut connaître d’armistice qu’à la condi­tion d’avoir été culti­vé sous forme de guerre véri­table, qui est la trans­for­ma­tion de la bru­ta­li­té de tous envers tous en une puis­sance des­truc­trice d’un groupe orga­ni­sé, contre d’autres, dési­gnés comme enne­mis, c’est à dire choi­sis comme tels. Dans la guerre, l’ennemi ne l’est jamais par nature, il est tou­jours une cible cultu­rel­le­ment choi­sie. Si la guerre est vou­lue, si elle est une affaire d’Etats plu­tôt qu’une force s’exerçant entre les indi­vi­dus, alors c’est bien la sagesse, et donc la culture, qui en a la charge. Et Athènes ne s’y est pas trom­pée en se pla­çant sous la pro­tec­tion d’Athéna, plu­tôt que sous le patro­nage de Poséidon.

Ce qu’il y a donc à gagner à voir en la vio­lence un fait de culture, c’est que l’homme en devient abso­lu­ment res­pon­sable. Après tout, la façon dont on légi­time la domi­na­tion des hommes sur les femmes dans l’historie s’appuie sou­vent sur l’argument d’une ori­gine natu­relle d’une telle domi­na­tion, qui signi­fie que l’homme n’en est pas res­pon­sable. Reconnaître que cette vio­lence est en fait cultu­relle en fait le résul­tat d’un choix, un élé­ment conven­tion­nel qui peut être retra­vaillé, et à pro­pos duquel les hommes ont des comptes à rendre. Car si la nature déter­mine une condi­tion, c’est à dire ce qui n’est pas négo­ciable, ce avec quoi il fau­dra bien faire, la culture est, elle, ce qui déter­mine une situa­tion, ce qui peut être formé d’une manière, ou d’une autre. On peut donc dire que là où la nature est de l’ordre de la néces­si­té, la culture est, elle, de l’ordre de la contin­gence. Nous serions ani­maux, nous obéi­rions sans le savoir à la néces­si­té de la bru­ta­li­té ins­tinc­tive, et on ne pour­rait por­ter sur nos com­por­te­ments aucun juge­ment moral, puisqu’on ne pour­rait pas nous en tenir pour res­pon­sables. Parce que nous sommes humains, et parce que la vio­lence est une forme culti­vée de cette bru­ta­li­té, nous savons très bien ce que nous fai­sons quand nous somme vio­lents. Nous en sommes donc res­pon­sables, puisque la façon dont nous met­tons notre force en oeuvre est choi­sie, parmi d’autres manières de faire. Allons plus loin : même la manière dont nous ten­tons de jus­ti­fier la vio­lence par la nature est tout à fait consciente. N’importe quel homme est capable de recon­naître que lorsqu’il tente de légi­ti­mer la domi­na­tion des femmes par une cause soi-disant natu­relle, il ne fait que choi­sir l’interprétation qui l’arrange le plus, parmi d’autres inter­pré­ta­tions qui le valo­risent moins. Une jus­ti­fi­ca­tion est une démarche cultu­relle, qui élève le phé­no­mène au-dessus de la nature pour le faire entrer dans le domaine cultu­rel, y com­pris quand il s’agit de mau­vaise foi, d’erreur ou de men­songe. En ce sens, la culture offre bien une forme de pro­tec­tion contre la vio­lence, puisqu’elle per­met, et c’est pri­mor­dial, de la recon­naître comme telle. Mais ce fai­sant, et on ne peut pas le lui repro­cher, elle la génère aussi, au sens où elle la fait émer­ger, elle la révèle au milieu du chaos géné­ra­li­sé de la nature. Ce qu’il y a à gagner dans le pas­sage de la bru­ta­li­té à la vio­lence, c’est qu’on en décide la forme, et que celle-ci peut enca­drer le mieux pos­sible ces forces qui, sinon, s’accompliraient aveu­glé­ment. Après tout, la vio­lence dans cer­tains sports, dans cer­tains jeux, dans cer­tains films, est déjà une force à laquelle on a donné une forme, c’est à dire des limites. Et après tout aussi, comme le montre Freud, cer­taines formes de vie sociale, que nous consi­dé­rons comme des signes de bonne édu­ca­tion, sont en fait la subli­ma­tion – c’est à dire la forme éle­vée, culti­vée – d’instincts puis­sants qui, livrés à eux mêmes, seraient tout à fait des­truc­teurs (les forces de l’ordre sont la socia­li­sa­tion des pul­sions de bru­ta­li­té phy­sique, la poli­tesse est une mise en forme de nos anta­go­nismes, la famille est la forme culti­vée qu’on donne à la pul­sion sexuelle). Le pas­sage à la vio­lence pro­tège donc de celle-ci en exi­geant que nous puis­sions répondre de nos comportements.

La vio­lence est dès lors ce que nous en fai­sons. Sans doute peut-on alors trou­ver là une légi­ti­mi­té à la for­mule de Weber, selon laquelle l’Etat est le “mono­pole de la vio­lence phy­sique légi­time” (for­mule qu’on peut lire dans son ouvrage le Savant et le poli­tique). Au pre­mier abord, en lisant une telle pro­po­si­tion, et même si on la com­prend parce qu’elle se situe dans la tra­di­tion de l’Etat envi­sa­gé comme « contrat » entre les citoyens (cha­cun accep­tant de ne plus faire usage privé de sa force, de remettre celle-ci entre les mains d’un pou­voir ins­ti­tué, recon­nu, qui met­tra en œuvre cette puis­sance au nom de tous, et non plus afin de satis­faire des inté­rêts par­ti­cu­liers), on a ten­dance à regret­ter que Weber ait uti­li­sé le terme « vio­lence », au lieu du mot « force ». Mais un tel regret s’appuie sur la convic­tion selon laquelle la vio­lence est un mal natu­rel dont le pas­sage à l’état social est censé nous éloi­gner et nous pro­té­ger. En fait, c’est plus com­pli­qué que cela, et la for­mule de Weber, même si elle ne l’explicite pas sur le moment, per­met de le com­prendre : la rela­tion natu­relle relève de la bru­ta­li­té, mais l’homme, conscient de ses actes et apte à leur don­ner une valeur, ne connaît pas cet état. Parce que la culture n’est pas la seule éru­di­tion, il faut recon­naître que tout homme est culti­vé, au sens où aucun homme ne fonc­tionne selon les stricts motifs des ins­tincts. D’ailleurs, l’homme à l’état de nature, tel que Rousseau en parle, n’a jamais exis­té. C’est un concept formé pour les besoins de la réflexion de Rousseau, qui per­met de savoir ce que l’homme est essen­tiel­le­ment, et de dis­tin­guer cela de ce que la culture en fait. Tout homme est donc culti­vé. Dès lors, tout homme est comp­table des souf­frances qu’il génère, mais pour cela, il faut bien que la vio­lence soit recon­nue comme un fait de culture, c’est-à-dire comme ce qui peut être, ou ne pas être, ce qui est suf­fi­sam­ment contin­gent pour qu’on ait la liber­té de ne pas la mettre en œuvre. Car si la nature est le domaine de la néces­si­té, et si la culture est de l’ordre de la contin­gence, alors la culture est aussi le ter­ri­toire de la liber­té, qui néces­site que ce que nous fai­sons puisse ne pas être fait. Ainsi, légi­ti­mer une pra­tique telle que la cor­ri­da en affir­mant qu’il faut la res­pec­ter en tant que forme cultu­relle n’est pas un argu­ment effi­cace, puisqu’au contraire, si la cor­ri­da est une forme cultu­relle, alors elle n’a rien de néces­saire. Mieux vau­drait alors mon­trer que, parce qu’elle est vio­lente, elle est une trans­for­ma­tion de cette bru­ta­li­té natu­relle qui réclame à être enca­drée pour qu’on n’en soit pas vic­time sous d’autres formes, bien moins maî­tri­sées. Mais dès lors que la cor­ri­da est reven­di­quée comme une forme cultu­relle, ceux qui la pra­tiquent en deviennent, aussi, res­pon­sables, puisque c’est libre­ment qu’ils choi­sissent de la mettre en oeuvre. Or cette res­pon­sa­bi­li­té est, elle-même, un fait de culture : il n’y a pas de res­pon­sa­bi­li­té natu­relle, car répondre de ses actes réclame qu’on puisse être inter­pel­lé, qu’on puisse recon­naître la valeur du ques­tion­ne­ment d’autrui, et qu’on se sente appe­lé à y répondre. Seule la culture (la maî­trise de la parole, du lan­gage, la recon­nais­sance d’autrui, la conscience des ses propres actes et de la valeur qu’on peut leur recon­naître) per­met la res­pon­sa­bi­li­té, et le pas­sage de la bru­ta­li­té natu­relle à la vio­lence est en par­tie le pas­sage d’une force aveugle et ano­nyme à une puis­sance qu’on désigne comme vio­lente, qu’on recon­naît comme telle et qu’on choi­sit en connais­sance de cause. Dès lors, la culture crée la vio­lence, et l’entretient, au sens où elle la cultive comme une forme déli­mi­tée, mais elle nous en pro­tège aussi, au sens où en la culti­vant elle lui donne une forme que nous pou­vons recon­naître, dont nous savons bien que nous en sommes les auteurs, et dont nous savons dès lors que nous aurons à en rendre compte. Elle nous en pro­tège donc au sens où elle déli­mite une forme d’action dont nous ne pour­rons pas nous dédouaner.

Toute natu­ra­li­sa­tion de la vio­lence cherche à la légi­ti­mer, mais ce fai­sant, elle affirme l’existence d’une sphère de l’action, dénuée de toute forme de valeurs, et sur laquelle on n’aurait aucun contrôle, une sphère au sein de laquelle, dès lors, rien n’est jamais vrai­ment légi­time. Une telle démarche échoue donc intel­lec­tuel­le­ment. De plus, cette assi­mi­la­tion de la vio­lence à la sphère natu­relle a comme consé­quence la déres­pon­sa­bi­li­sa­tion totale de ceux qui la pra­tiquent, dont on com­prend bien qu’ils auront effec­ti­ve­ment inté­rêt à pen­ser qu’ils n’y sont fina­le­ment pour rien, puisque le monde est par nature violent. Nous avons vu qu’en réa­li­té nous ne voyons de vio­lence dans la nature que lorsque l’être humain en est vic­time. En réa­li­té, la vio­lence n’a rien d’une force aveugle. Ce qui fait de cer­taines mises en œuvre de la force une vio­lence, c’est pré­ci­sé­ment l’intention de domi­na­tion qu’elle com­porte, qui ne peut être le fait que des êtres humains, et qui dépasse ample­ment le simple cadre de la stricte sur­vie qui n’est, elle, que le théâtre de la bru­ta­li­té. Ainsi, il est néces­saire de recon­naître que la culture ne nous éloigne pas de la vio­lence, puisqu’elle est la condi­tion de son émer­gence, c’est-à-dire de la recon­nais­sance du carac­tère contin­gent de cette bru­ta­li­té, qui en fait un acte libre­ment consen­ti, volon­taire, dont l’homme doit-être dès lors tenu pour res­pon­sable. Mais ce fai­sant, et dans cette limite, on peut dire que c’est en culti­vant la vio­lence que nous pou­vons espé­rer nous en protéger.

Harry Staut

Et si vous chan­giez d’air ?

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