Le Moyen Âge était-il écolo ?

Temps de lec­ture : 2 minutes

Dès la Préhistoire, les hommes brûlent des plaines ou abattent des arbres pour créer des zones de culture. Alors que le chris­tia­nisme et la féo­da­li­té se déve­loppent au Moyen Âge, une nou­velle per­cep­tion de l’es­pace sau­vage se met en place. 

Histoire de l’écologie poli­tique : quelles rela­tions liaient nos ancêtres du Moyen Âge avec ce que nous appe­lons aujourd’hui “la nature” ? C’est une his­toire avec des loups, des ours et des aurochs ; c’est une his­toire avec des forêts défri­chées et des espaces sau­vages ; c’est une his­toire avec une lec­ture reli­gieuse de la nature, tein­tée de sur­na­tu­rel, mais avec aussi de solides connais­sances sur ce qui nous entoure. Alors, fallait-il se pré­mu­nir de la nature, la pro­té­ger, ou sim­ple­ment l’exploiter ? Xavier Mauduit

Si les ori­gines de la crise éco­lo­gique actuelle sont sou­vent reliées aux déve­lop­pe­ments de la science, de la tech­nique et sur­tout de l’industrialisation au XIXe siècle, les rap­ports entre l’homme et son envi­ron­ne­ment avant le XIXe siècle sont encore trop rare­ment envi­sa­gés dans le débat public. Avant le XIXe siècle, et notam­ment au Moyen Âge, les hommes vivaient-ils en par­faite har­mo­nie avec la “nature” ? Étaient-ils, comme des ani­maux sau­vages, sou­mis à ses cata­clysmes et à son bon vouloir ? 

Dans les textes du haut Moyen Âge, le mot « nature » relève davan­tage de la pen­sée phi­lo­so­phique, de la théo­lo­gie, que d’une défi­ni­tion du monde phy­sique tel qu’on le conçoit aujourd’­hui. Le terme “natu­ra” va être uti­li­sé plu­tôt à la fin du XIIIe siècle. Dans “Le Roman de la rose”, Dame nature est une allé­go­rie qui incarne les élé­ments natu­rels et qui en fait une espèce de prin­cipe. À la fin du XIIIe siècle, au moment où on a réin­ves­ti les connais­sances antiques, notam­ment d’Aristote et la méca­nique du monde, la nature est pen­sée comme un cor­pus d’élé­ments agis­sant en auto­no­mie, avec leur sys­tème et leurs règles, mais tou­jours liés à la créa­tion divine. Fabrice Guizard

Bien sûr, il n’en est rien : l’aménagement de l’environnement par l’homme remonte au moins à l’Antiquité. Au Moyen Âge, en par­ti­cu­lier, émergent de nou­velles manières de pen­ser les rap­ports de l’homme à la nature, liées au déve­lop­pe­ment du chris­tia­nisme, du sys­tème féo­dal ou encore des puis­sances éta­tiques. Ces approches médié­vales de l’environnement sont-elles pré­da­trices, pro­duc­ti­vistes, pro­tec­tion­nistes voire éco­lo­gistes ? Nous en par­lons avec nos invi­tés Pauline Guéna et Fabrice Guizard.

Le Moyen Âge s’ouvre sur une déstruc­tu­ra­tion de l’Empire romain. On a une sorte de relo­ca­li­sa­tion des pro­duc­tions, en tout cas, une baisse du com­merce. Le cou­vert fores­tier, sans deve­nir l’es­pèce de forêt che­ve­lue qu’on a ima­gi­née, doit croître jus­qu’au début du VIe siècle. La crois­sance reprend vers le VIIe siècle, la féo­da­li­té met un vrai coup d’ac­cé­lé­ra­teur puisque chaque petit sei­gneur ter­rien, qui hérite son fief de la déstruc­tu­ra­tion de l’Empire caro­lin­gien, a inté­rêt à en tirer le maximum.

Au XIIIe siècle, on a un monde “plein”. L’Occident est beau­coup plus peu­plé. Pour se don­ner une idée, il y aurait vingt mil­lions d’ha­bi­tants dans les fron­tières de la France actuelle. À ce moment-là, il y a de vrais pro­grès de l’a­gri­cul­ture, un amé­na­ge­ment de l’es­pace com­plet, des pol­ders, des cours d’eau de plus en plus exploi­tés, des assè­che­ments des terres de plus en plus nom­breux, etc. Le monde est si plein qu’on repousse le bétail vers des terres de moins bonne qua­li­té. Les gens recom­mencent à avoir faim, des famines réap­pa­raissent. En 1347 sur­vient la peste. Près d’un tiers de la popu­la­tion aurait dis­pa­ru. Mais la peste n’est pas un choc suf­fi­sant pour endi­guer cette crois­sance, qui reprend dès le XVe siècle. Pauline Guéna

Partagez :
Pub…