C’est surtout au XIXe siècle et alors que le music hall anglais est en plein essor, que le vaudeville, en tant que forme comique parsemée d’interludes musicaux sur des airs connus qu’on recycle à tout va et où l’on voit des personnages pris dans des situations rocambolesques, prend pied sur la scène française et devient véritablement le genre qui s’est depuis institutionnalisé. La naissance du vaudeville doit également être rattachée à l’évolution des mœurs et à la nouvelle stratification qui fait le paysage social français, qui doit désormais compter la classe bourgeoise comme un élément économique et politique moteur capable de se hisser, par ses ressources financières, à la hauteur d’une aristocratie qui n’est déjà plus que l’ombre d’elle-même. La littérature et la caricature en feront leurs choux gras en montrant le bourgeois comme un faiseur d’argent, un ambitieux ventripotent dont les rêves d’ascension sociale se teintent d’une incurable sottise et de préjugés indémontables. Ces travers seront stigmatisés par les vaudevillistes qui feront du bourgeois un personnage stéréotypé, à mi-chemin entre le provincial indécrottable et le coureur parisien, un personnage qui agite beaucoup d’air autour de lui pour sauver sa réputation à tout prix alors qu’il se débat dans des aventures peu glorieuses de cocufiage et d’adultère.
L’histoire, le temps, ont fait le tri dans l’ immense production de ce genre (plusieurs milliers) en séparant le bon grain de l’ivraie et la postérité n’a conservé de cette machine à produire du rire qu’une poignée d’auteurs : Scribe, Augier, Meilhac et Halévy, Sardou, mais surtout Labiche, Feydeau et Courteline, qui continuent tous trois de faire recette de nos jours.
A.N.I