Les enjeux de la COP 26

Temps de lec­ture : 4 minutes

Le rap­port du Groupe d’ex­perts inter­gou­ver­ne­men­tal sur l’é­vo­lu­tion du cli­mat (Giec) de juin se montre très alar­miste sur les effets du réchauf­fe­ment cli­ma­tique. Pour ces experts scien­ti­fiques de l’ONU, pour limi­ter la hausse des tem­pé­ra­tures à 1,5 °C, le monde doit, d’ici à 2030, réduire ses émis­sions de 45 % par rap­port à 2010.

Réchauffement climatique : Le pire est à venir selon les experts du Giec

Le Giec estime qu’une hausse des tem­pé­ra­tures supé­rieure à 1,5°C pour­rait entraî­ner « pro­gres­si­ve­ment des consé­quences graves, pen­dant des siècles, et par­fois irré­ver­sibles ». Les aléas cli­ma­tiques pro­vo­que­ront une hausse des « pertes sou­daines » dans les sys­tèmes de pro­duc­tion ali­men­taire, que ce soit de l’a­gri­cul­ture, de l’é­le­vage, de la pêche ou de l’a­qua­cul­ture. Selon les experts, jus­qu’à 80 mil­lions de per­sonnes sup­plé­men­taires seront mena­cées par la faim d’ici à 2050, le manque d’eau pour­rait mettre en péril la rizi­cul­ture dans 40 % des régions pro­duc­trices. Les prix pour­raient grim­per de 30 % d’ici à trente ans et faire bas­cu­ler plus de 180 mil­lions de pauvres au bord de la mal­nu­tri­tion chro­nique, très majo­ri­tai­re­ment en Afrique et en Asie du sud-est. Si les tem­pé­ra­tures pro­gressent de 1,5°C à 2°C, 420 mil­lions de per­sonnes de plus seraient expo­sées à des cha­leurs extrêmes et 65 mil­lions à des cani­cules excep­tion­nelles tous les cinq ans.

Accords de Paris, loi “climat et résilience”… 

Le 12 décembre 2015, 195 pays signaient “les Accords de Paris”, un accord his­to­rique pour le cli­mat lors de la COP21. Premier accord inter­na­tio­nal depuis le Protocole de Kyoto à enga­ger une majo­ri­té de nations dans un méca­nisme col­lec­tif de réduc­tion des émis­sions de gaz à effet de serre, il fixait l’ob­jec­tif de limi­ter à 1,5 degré voire 2 degrés le réchauf­fe­ment cli­ma­tique à l’ho­ri­zon 2100 et d’at­teindre la neu­tra­li­té car­bone d’ici 2050. Pour lut­ter contre le réchauf­fe­ment cli­ma­tique, la loi “cli­mat et rési­lience” a été adop­tée le 24 août 2021. Elle est ins­pi­rée des tra­vaux des 150 membres de la conven­tion citoyenne qui ont plan­ché pen­dant 8 mois pour défi­nir une série de mesures per­met­tant d’atteindre une baisse d’au moins 40% des émis­sions de gaz à effet de serre d’ici 2030 (par rap­port à 1990). On y retrouve des mesures comme la sup­pres­sion de lignes aériennes inté­rieures en cas d’al­ter­na­tives en train de moins de 2h30 ou l’in­ter­dic­tion de mise en loca­tion des « pas­soires ther­miques » en 2025 et 2028. Egalement dans cette loi “cli­mat et rési­lience”, des villes moins pol­luées avec des zones où les voi­tures les plus pol­luantes seront lais­sés à l’extérieur des centres-villes, des citoyens mieux infor­més et moins de publi­ci­té, moins d’emballage, un sou­tien aux éner­gies renou­ve­lables, moins de béto­ni­sa­tion des terres et un ren­for­ce­ment de la pro­tec­tion judi­ciaire de l’environnement. 

Cop26 : Les bons et les mauvais élèves

Au 25 octobre, 143 Etats sur les 191 qui devaient limi­ter à 1,5 degré voire 2 degrés le réchauf­fe­ment cli­ma­tique à l’ho­ri­zon 2100 et d’at­teindre la neu­tra­li­té car­bone d’ici 2050, soit 61 % des émis­sions de gaz à effet de serre de la pla­nète, ont pris des enga­ge­ments nou­veaux. La Chine, pre­mier émet­teur mon­dial (27 % du total) a offi­ciel­le­ment trans­mis les siens jeudi aux Nations unies, à trois jours de la COP26. Ils reprennent les objec­tifs de sa feuille de route, à savoir atteindre son pic d’é­mis­sions « avant 2030 » et la neu­tra­li­té car­bone « avant 2060 ». Son pré­sident Xi Jinping n’ira pas à Glasgow… La Russie, qui vise le même objec­tif de neu­tra­li­té car­bone, ne sera pas non plus repré­sen­tée par Vladimir Poutine à la Cop26.

En revanche, après avoir lais­sé pla­ner le sus­pense, Narendra Modi, le Premier ministre indien, vien­dra à la COP26, entre­te­nant l’es­poir d’un nou­vel enga­ge­ment ferme. A ce jour, l’Inde, deuxième plus gros pol­lueur de la pla­nète, n’a pas publié de nou­velles contri­bu­tions cli­ma­tiques déter­mi­nées au niveau natio­nal. Les autres pays les plus émet­teurs, comme ceux du Golfe et l’Australie, se sont réen­ga­gés, mais de façon peu contrai­gnante. Quant aux Etats-Unis, s’ils se sont remis dans le tempo, en affi­chant un objec­tif de réduc­tion de 50 à 52 % de leurs gaz à effet de serre d’ici 2030, il va leur fal­loir le rendre crédible.

La COP 26 qui se tien­dra jus­qu’au 12 novembre doit notam­ment per­mettre aux états-parties de s’ac­cor­der sur l’o­rien­ta­tion des mar­chés vers un sys­tème mon­dial de taxe sur le car­bone qui per­mette la réduc­tion des émis­sions de gaz à effet de serre. Parmi les objec­tifs fon­da­men­taux figure aussi la fin de la dépen­dance au char­bon, l’é­li­mi­na­tion pro­gres­sive des com­bus­tibles fos­siles, la fin des inves­tis­se­ments dans l’é­co­no­mie grise ou brune. 

La mobilisation du secteur financier

L’un des enjeux prin­ci­paux de cet Cop26 est la mobi­li­sa­tion de la finance Preuve de l’im­por­tance de ce défi, le par­rain de cette COP, n’est autre que Mark Carney, l’an­cien patron de la Banque d’Angleterre et l’un des chantres de la finance verte. Concrètement, par­ve­nir à la neu­tra­li­té car­bone en 2050 afin de main­te­nir la hausse des tem­pé­ra­tures sous les 1,5 °C, implique un effort colos­sal : il faut décar­bo­ner l’in­dus­trie, les trans­ports, déve­lop­per les éner­gies renou­ve­lables, élec­tri­fier le parc auto­mo­bile, réno­ver les loge­ments, repen­ser l’a­gri­cul­ture… Tout ceci néces­site de mobi­li­ser 6.900 mil­liards de dol­lars par an d’ici 2030, d’a­près les esti­ma­tions de l’OCDE. Une somme qui ne peut pas repo­ser uni­que­ment sur les Etats. D’autant que ces der­niers peinent eux-mêmes à être à la hau­teur du défi. En 2009, lors de la confé­rence sur le cli­mat de Copenhague, les pays du Nord avaient pro­mis 100 mil­liards de finan­ce­ment annuel à par­tir de 2020 pour les pays du Sud pour les aider à lut­ter contre le chan­ge­ment cli­ma­tique. Non seule­ment les 100 mil­liards n’ont tou­jours pas été récol­tés, mais sur­tout, ce mon­tant est très infé­rieur aux besoins réels. Selon le der­nier bilan publié par l’or­ga­ni­sa­tion de coopé­ra­tion et de déve­lop­pe­ment éco­no­mique (OCDE) en sep­tembre, en 2019 l’en­semble des aides ver­sées par les pays riches aux pays moins déve­lop­pés n’a atteint que 79,6 mil­liards de dol­lars… La mobi­li­sa­tion des ins­ti­tu­tions finan­cières est éga­le­ment néces­saire dans la mesure où elles font par­tie des plus émet­trices de CO2, à tra­vers notam­ment les émis­sions pro­duites par les entre­prises pré­sentes dans leur por­te­feuille d’in­ves­tis­se­ment et de finan­ce­ment. La semaine der­nière, les grandes banques fran­çaises se sont aussi enga­gées, dès 2022, à ne plus finan­cer « les pro­jets dédiés aux hydro­car­bures non-conventionnels » ainsi que « les entre­prises dont la part d’hy­dro­car­bures non conven­tion­nels dans l’ex­plo­ra­tion et la pro­duc­tion seraient […] au-delà de 30 % de leur activité ». 

Que peut-on attendre de cette Cop26 ? Les Etats par­vien­dront ils à se mettre d’ac­cord sur de nou­veaux accords pour réduire la pro­duc­tion de gaz à effet de serre ? Nous en dis­cu­tons avec nos invités. 

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