Madame de Lafayette – La Princesse de Clèves – Partie I – l’incipit – analyse – 02

Temps de lec­ture : 17 minutes

La magni­fi­cence et la galan­te­rie n’ont jamais paru en France avec tant d’é­clat que dans les der­nières années du règne de Henri second. Ce prince était galant, bien fait et amou­reux ; quoique sa pas­sion pour Diane de Poitiers, duchesse de Valentinois, eût com­men­cé il y avait plus de vingt ans, elle n’en était pas moins vio­lente, et il n’en don­nait pas des témoi­gnages moins écla­tants.
Comme il réus­sis­sait admi­ra­ble­ment dans tous les exer­cices du corps, il en fai­sait une de ses plus grandes occu­pa­tions. C’étaient tous les jours des par­ties de chasse et de paume, des bal­lets, des courses de bagues, ou de sem­blables diver­tis­se­ments ; les cou­leurs et les chiffres de madame de Valentinois parais­saient par­tout, et elle parais­sait elle-même avec tous les ajus­te­ments que pou­vait avoir made­moi­selle de La Marck, sa petite-fille, qui était alors à marier.
La pré­sence de la reine auto­ri­sait la sienne. Cette prin­cesse était belle, quoi­qu’elle eût passé la pre­mière jeu­nesse ; elle aimait la gran­deur, la magni­fi­cence et les plai­sirs. Le roi l’a­vait épou­sée lors­qu’il était encore duc d’Orléans, et qu’il avait pour aîné le dau­phin, qui mou­rut à Tournon, prince que sa nais­sance et ses grandes qua­li­tés des­ti­naient à rem­plir digne­ment la place du roi François pre­mier, son père.
L’humeur ambi­tieuse de la reine lui fai­sait trou­ver une grande dou­ceur à régner ; il sem­blait qu’elle souf­frît sans peine l’at­ta­che­ment du roi pour la duchesse de Valentinois, et elle n’en témoi­gnait aucune jalou­sie ; mais elle avait une si pro­fonde dis­si­mu­la­tion, qu’il était dif­fi­cile de juger de ses sen­ti­ments, et la poli­tique l’o­bli­geait d’ap­pro­cher cette duchesse de sa per­sonne, afin d’en appro­cher aussi le roi. Ce prince aimait le com­merce des femmes, même de celles dont il n’é­tait pas amou­reux : il demeu­rait tous les jours chez la reine à l’heure du cercle, où tout ce qu’il y avait de plus beau et de mieux fait, de l’un et de l’autre sexe, ne man­quait pas de se trou­ver.
Jamais cour n’a eu tant de belles per­sonnes et d’hommes admi­ra­ble­ment bien faits ; et il sem­blait que la nature eût pris plai­sir à pla­cer ce qu’elle donne de plus beau, dans les plus grandes prin­cesses et dans les plus grands princes. Madame Élisabeth de France, qui fut depuis reine d’Espagne, com­men­çait à faire paraître un esprit sur­pre­nant et cette incom­pa­rable beau­té qui lui a été si funeste. Marie Stuart, reine d’Écosse, qui venait d’é­pou­ser mon­sieur le dau­phin, et qu’on appe­lait la reine Dauphine, était une per­sonne par­faite pour l’es­prit et pour le corps : elle avait été éle­vée à la cour de France, elle en avait pris toute la poli­tesse, et elle était née avec tant de dis­po­si­tions pour toutes les belles choses, que, mal­gré sa grande jeu­nesse, elle les aimait et s’y connais­sait mieux que per­sonne. La reine, sa belle-mère, et Madame, soeur du roi, aimaient aussi les vers, la comé­die et la musique. Le goût que le roi François pre­mier avait eu pour la poé­sie et pour les lettres régnait encore en France ; et le roi son fils aimant les exer­cices du corps, tous les plai­sirs étaient à la cour. Mais ce qui ren­dait cette cour belle et majes­tueuse était le nombre infi­ni de princes et de grands sei­gneurs d’un mérite extra­or­di­naire. Ceux que je vais nom­mer étaient, en des manières dif­fé­rentes, l’or­ne­ment et l’ad­mi­ra­tion de leur siècle.

Ce pas­sage, placé au début du roman, pré­sente le contexte his­to­rique du récit. Comment, à tra­vers un inci­pit, Madame de La Fayette rend-elle la vie à une époque révo­lue, tout en don­nant de pré­cieux ren­sei­gne­ments qui vont per­mettre au lec­teur de mieux com­prendre la suite de l’oeuvre ?

I- Le cadre spatio-temporel et l’intrigue.
Comme tout inci­pit, ce pas­sage plante le lieu et l’époque, ainsi que l’intrigue.
1°- L’époque et le lieu.
● L’époque :
- L’isotopie de la cour : « Règne, Henri second (l.2), prince (l.3), Diane de Poitiers (l.4), duchesse de Valentinois (l.4, 21), par­ties de chasse et de paume (l.8), bal­lets, courses à la bague (l.9), Madame de Valentinois (l.10), Mademoiselle de la Marck (l.12), reine (l.13, 19, 26, 32), prin­cesse (l.13), roi (l.15, 20, 24, 35), duc d’Orléans (l.15 – 16), dau­phin (l.16), prince (l.16, 24), roi François I (l.18), régner (l.20), duchesse (l.23), cour (l.29, 36), prin­cesses (l.31), princes (l.32, 37), roi François (l.33 – 34), sei­gneur (l.37) », qui déve­loppe les champs lexi­caux de :
La royau­té (l.2, 13, 15, 16, 18, 19, 20, 24, 26, 29, 32, 33 – 34, 35, 36).
La noblesse (l.3, 4, 10, 12, 13, 15 – 16, 21, 23, 24, 31, 32, 37).
Les jeux de cour (l.8, 9) :
v Le jeu de paume : Jeu de balle pra­ti­qué depuis près d’un mil­lé­naire. Initialement joué à main nue ou gan­tée de cuir, il est ensuite deve­nu un sport de raquettes. Il est l’an­cêtre direct de la pelote basque, du ten­nis, et plus géné­ra­le­ment de tous les sports de raquettes.
v La course à la bague : Dans les courses de che­vaux, il n’y avait que des prix équestres, par galan­te­rie, les dames ont été trans­for­mées en juges de ce style de diver­tis­se­ment. La bague est pla­cée à hau­teur du front du cava­lier qui doit arri­ver, alors qu’il est au galop, à la faire glis­ser au bout de sa lance.
v La chasse, sou­vent à courre, ou avec l’aide d’oiseaux de proie, et les bal­lets étaient des passe-temps typi­que­ment nobles.
═► L’action se déroule durant la monar­chie fran­çaise, comme l’atteste la répé­ti­tion du nom propre : « France » (l.1, 35), donc ni durant les période révo­lu­tion­naires, ni en répu­blique, ce qui paraît évident, si l’on regarde la date du paru­tion de l’œuvre.
- Champ lexi­cal des per­son­nages his­to­riques nom­més : « Henri second (l.1), Diane de Poitiers (l.3 – 4), duchesse de Valentinois (l.4, 21), Madame de Valentinois (l.10), Mademoiselle de la Marck (l.12), duc d’Orléans (l.15 – 16), François I (l.18), le roi François (l.33 – 34) », com­bi­né à celui des péri­phrases qui dési­gnent d’autres per­son­nages his­to­riques : « La reine (l.13, 19, 26, 32), cette prin­cesse (l.13), le roi (l.15, 24), le dau­phin (l.16), du roi (l.20, 32), cette duchesse (l.23), ce prince (l.24), Madame, sœur du roi (l.32), le roi son fils (l.35) » :
« La reine (l.13, 19, 26, 32), cette prin­cesse (l.13) » repré­sente Catherine de Médicis, épouse d’Henri II.
« Le roi (l.15, 24), ce prince (l.24), le roi son fils (l.35) » repré­sente Henri II.
« Le dau­phin » (l.16) repré­sente le pre­mier dau­phin, François, dit « de Viennois », duc de Bretagne et décé­dé en 1536, à Tournon, après avoir absor­bé un verre d’eau à Lyon, ce qui a ali­men­té de nom­breuses rumeurs d’empoisonnement, car il parais­sait en bonne santé, avant la mort de son père.
« Cette duchesse » (l.23) repré­sente Diane de Poitiers, la maî­tresse d’Henri II.
« Madame, sœur du roi » (l.32) est cer­tai­ne­ment Marguerite de Savoie, la seule sœur viable qu’il soit res­tée à Henri II.
═► L’action va se situer au XVIème siècle, sous le règne d’Henri II, c’est-à-dire entre 1547 et 1559.
- La conces­sive : « Quoique sa pas­sion pour Diane de Poitiers, duchesse de Valentinois, eût com­men­cé il y avait plus de vingt ans » donne une indi­ca­tion tem­po­relle plus pré­cise : Diane de Poitiers a com­men­cé à s’occuper d’Henri II, alors qu’il avait 11 ans, à son retour de cap­ti­vi­té en Espagne, puisqu’elle avait été char­gé par François I de le poli­cer à la vie de cours, et de faire son édu­ca­tion. Le jeune gar­çon a com­men­cé à éprou­ver de l’amour pour cette femme, de vingt plus âgée que lui, à l’âge de 12 ans, en lui dédiant l’un de ses pre­miers tour­nois. Ils sont deve­nus amants en 1538. Si la pas­sion du roi date, comme le montre l’hyperbole, de « Plus de vingt ans » (l.4 – 5), il est pos­sible d’envisager que l’action se situe aux alen­tours de 1558, ce qui est accen­tué par :
La péri­phrase : « Les der­nières années du règne d’Henri second » (l.2).
La conces­sive qui qua­li­fie Catherine de Médicis : « Quoiqu’elle eût passé la pre­mière jeu­nesse » (l.14) : Cette reine avait le même âge que son époux, si elle a lar­ge­ment dépas­sé les trente ans, lui aussi.
La tem­po­relle : « Le roi l’avait épou­sée lorsqu’il était encore duc d’Orléans, et qu’il avait pour aîné le dau­phin » (l.15 – 16), à savoir avant 1533.
- Cette époque appar­tient au passé, comme l’attestent la pré­sence de temps du passé :
L’imparfait, qui exprime les actions révo­lues, mais qui ont duré ou qui ont été répé­ti­tives, ou qui sert aux des­crip­tions : « Etait (l.2, 5, 12, 13, 25, 36), avait (l.4, 16, 22, 26, 34), don­nait (l.5), réus­sis­saient (l.6), fai­sait (l.7), étaient (l.8, 36), parais­saient (l.10), parais­sait, pou­vait (l11), auto­ri­sait (l.13), aimait (l.14), des­ti­naient (l.17), fai­sait (l.19), sem­blait (l.20), témoi­gnait (l.21), obli­geait (l.23), aimait (l.24), demeu­rait (l.25), man­quait (l.27), sem­blait (l.30), aimaient (l.33), régnait (l.34), ren­dait (l.36) ».
Le passé simple, qui sou­ligne les actions révo­lues, mais qui ont été rapide ou ponc­tuelles : « Mourut (l.16) ».
Le plus-que-parfait, temps d’un passé révo­lu et sur­tout très loin­tain : « Avait épou­sée » (l.15).
Le passé com­po­sé, dit pré­sent du passé, qui concerne des actions plus récentes dans le passé, ou qui sont tou­jours vivantes dans l’esprit du nar­ra­teur : « Ont jamais paru (l.1), n’a eu (l.29) ».
● Isotopie du lieu : « France (l.1, 35), Tournon (l.16), chez la reine (l.26), cour (l.29, 36) », qui déve­loppe les champs lexi­caux de :
- La France (l.1, 16, 35).
- La Cour (l.26, 29, 36), lequel est ren­for­cé par l’isotopie de la cour : « Règne, Henri second (l.2), prince (l.3), Diane de Poitiers (l.4), duchesse de Valentinois (l.4, 21), par­ties de chasse et de paume (l.8), bal­lets, courses à la bague (l.9), Madame de Valentinois (l.10), Mademoiselle de la Marck (l.12), reine (l.13, 19, 26, 32), prin­cesse (l.13), roi (l.15, 20, 24, 35), duc d’Orléans (l.15 – 16), dau­phin (l.16), prince (l.16, 24), roi François I (l.18), régner (l.20), duchesse (l.23), cour (l.29, 36), prin­cesses (l.31), princes (l.32, 37), roi François (l.33 – 34), sei­gneur (l.37) ».
═► L’action se passe donc en France, à la cour du roi Henri II.
═► Registre réa­liste, à cause d’une base his­to­rique bien réelle. Le cadre spatio-temporel, très riche en ren­sei­gne­ments, per­met alors à Madame de la Fayette d’ébaucher les thèmes de son intrigue. (Voici la phrase de tran­si­tion entre le 1er et le deuxième para­graphe du pre­mier axe : Elle reprend le thème du para­graphe n°1, et annonce le para­graphe n°2.).

2°- L’intrigue.
Beaucoup d’incipit dévoilent les bases de l’intrigue du roman. Celui de La Princesse de Clèves ne s’appesantit pas sur elle dans cet extrait, il se contente de livrer aux lec­teurs une ambiance :
● Champ lexi­cal de l’amour : « Galanterie (l.1), galant, pas­sion (l.3), amou­reux (l.3, 25), aimait (l.14, 24), épou­sée (l.15), plai­sir (l.15, 35), atta­che­ment (l.20), jalou­sie (l.21), aimant (l.35) », ren­for­cé par :
- La gra­da­tion ascen­dante : « Galant, amou­reux, pas­sion » (l.3).
- Les hyper­boles : « Avec tant d’éclat (l.1 – 2), elle n’en était pas moins vio­lente (l.5), il n’en don­nait pas des témoi­gnages moins écla­tants (l.5 – 6) ».
- Le paral­lé­lisme : « Elle n’en était pas moins vio­lente (l.5) // Il n’en don­nait pas des témoi­gnages moins écla­tants (l.5 – 6) ».
- Les ana­phores : « Elle n’en était pas moins vio­lente (l.5) // Il n’en don­nait pas des témoi­gnages moins écla­tants (l.5 – 6) ».
- L’euphémisme : « L’attachement du roi » (l.20).
═► Les termes « Galanterie (l.1), et galant (l.3) » sont poly­sé­miques :
- Un homme sociable, de bonne com­pa­gnie, à la conver­sa­tion amou­reuse.
- Un homme à l’activité sexuelle intense.
═► La der­nière signi­fi­ca­tion est à obser­ver :
- Henri II est pas­sion­né­ment épris d’une femme, comme le prouve les hyper­boles : « Elle n’en était pas moins vio­lente, et il n’en don­nait pas des témoi­gnages moins écla­tants » (l.5 – 6), mais il ne s’agit pas de la sienne, dési­gnée par les péri­phrases : « La reine (l.13, 19, 26, 32), cette prin­cesse (l.13) », mais de « Diane de Poitiers, duchesse de Valentinois » (l.3 – 4) : Même si l’Histoire nous apprend qu’Henri II, comme tous les princes et rois, a fait un mariage de rai­son, à 14 ans, il n’en demeure pas moins qu’il trompe sa femme, et qu’il a ten­dance à être volage, comme le prouve la phrase asser­tive : « Ce prince aimait le com­merce des femmes, même de celles dont il n’é­tait pas amou­reux » (l.24 – 25) → Bien qu’il ait été fidèle à sa maî­tresse, Henri II a eu mal­gré tout trois autres liai­sons recon­nues, car cou­ron­nées d’enfants.
- Sa propre femme, Catherine de Médicis ne semble pas s’en offus­quer, comme le prouve l’hyperbole : « Sans peine » (l.20).
═► Le registre lyrique dévoile une ambiance pro­pice à un cer­tain liber­ti­nage, quoi que le terme soit un peu ana­chro­nique, et il est ainsi pos­sible que l’intrigue soit amou­reuse.
● Champ lexi­cal du diver­tis­se­ment : « Exercices du corps (l.7, 35), par­ties de chasse et de paume (l.8), bal­lets, courses de bagues, diver­tis­se­ments (l.9), plai­sirs (l.15, 35), l’heure du cercle (l.26), vers, comé­die, musique (l.33) », ren­for­cé par :
- Le pré­sen­ta­tif : « C’étaient » (l.7).
- Les hyper­boles : « Tous les exer­cices du corps, une de ses plus grandes occu­pa­tions (l.7), tous les jours (l.8), tous les plai­sirs (l.35) ».
- Les énu­mé­ra­tions : « Parties de chasse et de paume (l.8), des bal­lets, des courses de bagues (l.9), les vers, la comé­die (l.33) ».
═► Registre épi­dic­tique, grâce auquel il est aisé d’entrevoir une socié­té oisive, qui est aussi un monde clos, comme l’atteste l’isotopie de la cour et la péri­phrase : « L’heure du cercle » (l.26), donc pro­pice aux médi­sances.
● Champ lexi­cal de la beau­té : « Magnificence (l.1), bien fait (l.3), belle (l.13), magni­fi­cence (l.15), beau (l.27, 31), biens faits (l.30), belle, majes­tueuse (l.36) », ren­for­cé par les hyper­boles : « Avec tant d’éclat (l.1 – 2), de plus beau et de mieux fait (l.26 – 27), tant de belles per­sonnes (l.29), admi­ra­ble­ment bien faits (l.30), plus beau (l.31) ».
═► Registres lyrique, épi­dic­tique.
● Champ lexi­cal de per­son­nages hors du com­mun : L’isotopie de la cour est omni­pré­sente : « Règne, Henri second (l.2), prince (l.3), Diane de Poitiers (l.4), duchesse de Valentinois (l.4, 21), par­ties de chasse et de paume (l.8), bal­lets, courses à la bague (l.9), Madame de Valentinois (l.10), Mademoiselle de la Marck (l.12), reine (l.13, 19, 26, 32), prin­cesse (l.13), roi (l.15, 20, 24, 35), duc d’Orléans (l.15 – 16), dau­phin (l.16), prince (l.16, 24), roi François I (l.18), régner (l.20), duchesse (l.23), cour (l.29, 36), prin­cesses (l.31), princes (l.32, 37), roi François (l.33 – 34), sei­gneur (l.37) », et elle est sou­li­gnée par :
- De mul­tiples hyper­boles mélio­ra­tives : « Comme il réus­sis­sait admi­ra­ble­ment dans tous les exer­cices du corps (l.6 – 7), une si pro­fonde dis­si­mu­la­tion (l.22), Où tout ce qu’il y avait de plus beau et de mieux fait, de l’un et de l’autre sexe, ne man­quait pas de se trou­ver (l.26 à 28), jamais cour n’eu tant de belles per­sonnes et d’hommes admi­ra­ble­ment bien faits (l.29 – 30), les plus grandes prin­cesses (l.31), les plus grands princes (l.32), le nombre infi­ni de princes et de grands sei­gneurs d’un mérites extra­or­di­naire » (l.37 – 38) ».
- L’énumération : « Galant, bien fait et amou­reux » (l.3).
═► Nul sou­cis se semble s’abattre sur les per­son­nages, ils sont tous d’une admi­rable beau­té, laquelle est source de lyrisme et d’épidictique, ce qui est par­fois dis­cu­table, car l’Histoire affirme que Catherine de Médicis, hor­mis des jambes d’une sin­gu­lière beau­té qui la pous­sèrent à impo­ser la posi­tion de l’amazone, pour les femmes, quand elle mon­taient à che­val, afin de pou­voir mettre les siennes en valeur, était assez dis­gra­ciée par la nature. Cette per­fec­tion, qui semble rejoindre celle du début d’une uto­pie, car tout le monde paraît vivre heu­reux, dans la joie, le plai­sir et en har­mo­nie, dévoile alors, impli­ci­te­ment, le registre mer­veilleux, propre au contes de fées, lequel est ren­for­cé par l’emploi de l’adverbe de manière : « Admirablement » (l.6), et de l’adjectif épi­thète : « Extraordinaire » (l.38), qui évoque l’étonnement, la surprise.

II- Présentation des per­son­nages.
cet extrait rend vie à plu­sieurs per­son­nages, dont la pré­sen­ta­tion est sou­li­gnée par la struc­ture du texte.
1°- Les per­son­nages.
● Henri II :
- Sa nomi­na­tion :
Il est nommé dès le début du texte : Henri le second » (l.2).
Il est éga­le­ment repré­sen­té par des péri­phrases : « Ce Prince (l.2 – 3), le roi (l.15), duc d’Orléans (l.15 – 16), ce prince (l.24), le roi son fils (l.35) ».
Il est aussi repré­sen­té par le pro­nom per­son­nel de la troi­sième per­sonne du sin­gu­lier, aux fonc­tions de :
v Sujet : « Il » (l.5, 6, 7, 15, 16, 25).
v Déterminant pos­ses­sif : « Sa » (l.3).
═► Il n’est jamais COD, donc jamais actif, il est le roi, il com­mande et est obéi.
- Son sta­tut :
Il est le roi de France, comme l’atteste de champ lexi­cal de la royau­té : « Règne, Henri second (l.2), reine (l.13, 19, 26, 32), roi (l.15, 20, 24, 35), dau­phin (l.16), roi François I (l.18), régner (l.20), cour (l.29, 36), roi François (l.33 – 34) », et il doit ce sta­tut à la mort de son frère aîné, illus­trée par la pro­po­si­tion rela­tive : « Qui mou­rut à Tournon » (l.16), lequel avait énor­mé­ment de qua­li­tés, comme l’atteste l’hyperbole : « Prince que sa nais­sance et ses grandes qua­li­tés des­ti­naient à rem­plir digne­ment la place du roi François pre­mier, son père. » (l.16 à 18).
Il est marié, comme le prouve le plus-que-parfait : « Il l’avait épou­sée » (l.15).
Il est fils de roi, comme l’attestent :
v Les péri­phrases : « Roi François (l.18, 33 – 34), le roi son fils (l.35) », dont le pre­mière occur­rence est appo­sée la péri­phrase : « Son père » (l.18, 33 – 34).
v Le champ lexi­cal de la famille : « Aîné (l.16), père (l.18), sœur (l.32), fils (l.35) ».
Il a une maî­tresse, comme le prouvent :
v La gra­da­tion ascen­dante dans la pas­sion : « Galant, amou­reux, pas­sion » (l.3).
v Les hyper­boles, com­bi­nées au paral­lé­lisme et aux ana­phores : « Elle n’en était pas moins vio­lente, et il n’en don­nait pas des 6témoignages moins écla­tants » (l.5 – 6).
- Son carac­tère :
Il est spor­tif, comme l’attestent les hyper­boles : « Il réus­sis­sait admi­ra­ble­ment dans tous les exer­cices du corps (l.6 – 7), il en fai­sait une de ses plus grandes occu­pa­tions (l.7 – 8) », et la répé­ti­tion de la péri­phrase : « Les exer­cices de corps » (l.7, 35).
Il appré­cie la com­pa­gnie fémi­nine, comme l’atteste la péri­phrase : « Même de celles dont il n’é­tait pas amou­reux » (l.25).
Il est volage :
v Il est « Galant » (l.3), c’est-à-dire, sociable, de bonne com­pa­gnie, à la conver­sa­tion amou­reuse, mais aussi l’activité sexuelle intense.
v S’il est épris, comme le prouvent les hyper­boles : « Elle n’en était pas moins vio­lente, et il n’en don­nait pas des témoi­gnages moins écla­tants (l.5 – 6), les cou­leurs et les chiffres de madame de Valentinois parais­saient par­tout (l.10) », ce n’est pas de sa femme, mais de « Diane de Poitiers, duchesse de Valentinois » (l.3 – 4).
● Catherine de Médicis :
- Sa nomi­na­tion :
Elle n’est jamais nom­mée expli­ci­te­ment, par son patro­nyme.
Elle est nom­mée par son sta­tut de sou­ve­raine, grâce aux péri­phrases : « La reine (l.13, 19, 26, 32), prin­cesse (l.13) ».
Elle est éga­le­ment nom­mée grâce au pro­nom per­son­nel de la troi­sième per­sonne du sin­gu­lier, aux fonc­tions de :
v Sujet : « Elle » (l.14, 20, 21).
v Complément : « L’, lui » (l.15, 19, 23).
v Déterminant pos­ses­sif : « Sa, ses » (l.22, 23).
═► Elle est deux fois COD, donc pas­sive : Elle subit la liai­son de son époux, et en souffre pro­ba­ble­ment.
- Son sta­tut : Elle est la femme du roi, comme le sou­lignent :
L’emploi du verbe : « Epousée » (l.15).
La répé­ti­tion de la péri­phrase : « La reine » (l.13, 19, 26, 32).
La péri­phrase : « Cette prin­cesse » (l.13).
- Son phy­sique :
Elle est belle, comme l’atteste l’emploi de l’attribut : « Belle » (l.13), ce qui est inexact, d’un point de vue his­to­rique.
Elle est d’âge mûr, comme le montre l’euphémisme : « Elle eût passé la pre­mière jeu­nesse » (l.14).
- Son carac­tère :
Elle appré­cie son sta­tut de reine, comme l’attestent :
v L’emploi de l’épithète : « Ambitieuse » (l.19) : Qui a un désir exces­sif de recon­nais­sance et d’orgueil.
v L’hyperbole : « Lui fai­sait trou­ver une grande dou­ceur à régner » (l.19 – 20).
v Elle aime le luxe, comme l’atteste la gra­da­tion ascen­dante dans le plai­sir : « Elle aimait la gran­deur, la magni­fi­cence et les plai­sirs » (l.14 – 15).
Elle semble ne pas être gênée par la liai­son de son mari, comme le prouve l’hyperbole : « Sans peine » (l.20), et la néga­tion de toute sen­ti­ment de jalou­sie, grâce à l’emploi de l’indéfini : « Aucune » (l.21).
Mais ce sen­ti­ment est remis en ques­tion par la pré­sence de la tour­nure indé­fi­nie : « Il sem­blait » (l.20) : Il était de noto­rié­té publique que Catherine de Médicis était éprise de son mari qui ne l’aimait pas, et elle rava­lait sa fier­té pour pou­voir pro­fi­ter de sa pré­sence, comme l’atteste l’anaphore du verbe : « Approcher » (l.23 – 24), ainsi que la rela­tion de cause à effet : « La poli­tique l’o­bli­geait d’ap­pro­cher cette duchesse de sa per­sonne, afin d’en appro­cher aussi le roi » (l.23 – 24).
Elle est hypo­crite, comme l’attestent l’hyperbole : « Une si pro­fonde dis­si­mu­la­tion (l.22), et l’adjectif attri­but : « Difficile » (l.22) qui montre qu’elle savait maî­tri­ser ses sen­ti­ments à un point que nul ne pou­vait lire en elle.
Elle est rusée : Elle sait que le roi aime la com­pa­gnie des femmes, donc pour l’avoir auprès d’elle, elle sait s’entourer des plus jolies femmes de la cour, les­quelles attirent les plus beaux hommes, comme le montrent les hyper­boles : « Tous les jours (l.26), tout ce qu’il y avait de plus beau et de mieux fait, de l’un et de l’autre sexe, ne man­quait pas de se trou­ver (l.26 à 28) ».
═► Registres épi­dic­tique, réa­liste, tona­li­té épique.
● Diane de Poitiers :
- Sa nomi­na­tion :
Elle est dûment nom­mée : « Diane de Poitiers » (l.3 – 4).
Elle est dési­gnée aussi par des péri­phrases : « Duchesse de Valentinois (l.4, 21), madame de Valentinois (l.10) ».
Elle est aussi pré­sente grâce au pro­nom per­son­nel de la troi­sième per­sonne du sin­gu­lier, aux fonc­tions de :
v Sujet : « Elle, elle-même » (l.11).
v Adjectif pos­ses­sif : « Sienne » (l.13)
v Déterminant pos­ses­sif : « Sa » (l.12).
═► Tout comme Henri II, elle n’est jamais COD, elle ne subit jamais l’action, elle la pro­voque.
- Son sta­tut :
Elle est duchesse, comme le prouve la péri­phrase : « Duchesse de Valentinois » (l.4, 21), ce qui est un haut titre de noblesse.
Elle est la maî­tresse du roi, comme l’atteste l’indication tem­po­relle : « Plus de vingt ans » (l.4), sou­li­gnée par le pré­sen­ta­tif : « Il y avait » (l.4), qui valo­rise l’extraordinaire lon­gé­vi­té de cet illé­gi­time amour.
Elle est aimée du roi, comme le sou­lignent :
v La gra­da­tion ascen­dante dans la pas­sion : « Galant, amou­reux, pas­sion » (l.3).
v Les hyper­boles : « Elle n’en était pas moins vio­lente (l.5), il n’en don­nait pas des témoi­gnages moins écla­tants (l.6 – 7), les cou­leurs et les chiffres de madame de Valentinois parais­saient par­tout (l.10) ».
Elle a été marié, car elle est grand-mère, puisque sa des­cen­dance, dési­gnée par l’apposition : « Sa petite fille » (l.12), est nom­mée, grâce à la péri­phrase : « Mademoiselle de La Marck » (l.12).
Elle est assez âgée :
v Tout le monde sait qu’elle avait vingt ans de plus que son royal amant : Si Henri II, au moment de l’histoire a 39 ans, elle en a donc 59.
v Elle est grand-mère, comme le montre l’apposition : « Sa petite fille » (l.12), et ce, depuis un cer­tain temps, puisque la jeune fille est en âge de se marier, comme l’atteste la pro­po­si­tion rela­tive : « Qui était à marier ».
- Son carac­tère :
Elle semble coquette, comme l’atteste l’hyperbole : « Tous les ajus­te­ments que pou­vaient avoir made­moi­selle de La Marck » (l.11 – 12) : Elle ne s’habille pas comme quelqu’un de son âge, ce qui est un ren­sei­gne­ment ambi­gu :
v Soit elle est une vieille coquette ridi­cule.
v Soit, elle ne fait pas son âge, et mal­gré ses 59 ans, elle a tou­jours le phy­sique et le visage d’une jeune fille, ce qui, d’un point de vue his­to­rique, était le cas.
A aucun endroit, il est dit qu’elle aime le roi, mais par contre, elle est omni­pré­sente, comme le montrent :
v L’hyperbole : « Les cou­leurs et les chiffres de Madame de Valentinois parais­saient par­tout » (l.10).
v Elle mono­po­lise l’attention du roi, au point que la reine est obli­gée de la trai­ter ami­ca­le­ment, comme le prouve la litote : « Approcher cette duchesse de sa per­sonne » (l.23 – 24), si elle veut entre­voir son époux, comme le prouvent la pro­po­si­tion subor­don­née de but : « Afin d’en appro­cher aussi le roi » (l.24), et l’anaphore d’« Approcher » (l.23, 24).
═► Registre épi­dic­tique et réa­liste. Mais il faut mettre un bémol au réa­lisme, à cause de cer­taines dis­tor­sions his­to­riques : En effet, le nar­ra­teur, qui est omni­scient, d’où la foca­li­sa­tion zéro, a un cer­tain parti-pris. Il enjo­live le phy­sique de Catherine de Médicis, et montre impli­ci­te­ment qu’elle est éprise d’un mari qui la dédaigne, ce qui accom­pagne le per­son­nage, mal­gré la men­tion fort réel de son attrait pour la roue­rie, d’une tona­li­té pathé­tique. Et d’un autre coté, elle accuse impli­ci­te­ment Diane de Poitiers d’indécence, autant par son atti­tude que par son vête­ment, alors que l’Histoire nous apprend qu’elle fait tout ce qu’elle a pu pour ména­ger la reine, et que d’autre part, loin de se vêtir comme une jeune fille, elle avait pris des habits de deuils, et que c’est Henri II qui avait impo­sé à la cour les cou­leurs de sa Dame, qu’il avait adop­tées lui-même, le noir et l’or. La pré­sen­ta­tion de nom­breux per­son­nages his­to­riques, est mise en valeur par l’articulation du texte.

2°- La struc­ture du texte.
● l.1 à 2 : Présentation rapide du cadre spatio-temporel : L’action va se dérou­ler en « France » (l.1), à la moi­tié du XVIème siècle, puisqu’il s’agit des « Dernières années du règne d’Henri second » (l.2), dans un cadre enchan­teur, ce qui est accen­tué par le connec­teur logique de com­pa­rai­son « Tant…que » (l.1 – 2).
● l.2 à 12 : La pré­sen­ta­tion d’Henri II, sou­li­gnée par les connec­teurs logiques d’addition « Et » (l.3, 8, 10, 11), de conces­sion « Quoique » (l.3), de com­pa­rai­son « Comme » (l.6), d’alternative « Ou » (l.9) :
- Il est un homme agréable, comme le prouve l’énumération : « Galant, bien fait » (l.3).
- Il est amou­reux de « Diane de Poitiers » (l.3 – 4), comme l’atteste le champ lexi­cal de l’amour : « Galant, amou­reux, pas­sion (l.3) », orga­ni­sé en gra­da­tion ascen­dante, et sou­li­gné par les hyper­boles (l.5 – 6).
- Il est un spor­tif accom­pli, comme le prouve l’hyperbole (l.6 – 7).
- Il aime à se diver­tir, comme le sou­ligne le champ lexi­cal du diver­tis­se­ment : « Exercices du corps (l.7), par­ties de chasse et de paume (l.8), bal­lets, courses de bagues, diver­tis­se­ments (l.9) ».
● l.13 à 24 : Présentation de Catherine de Médicis, sou­li­gnée par les connec­teurs logiques de conces­sion « Quoiqu’ » (l.14), de temps « Lorsqu’ » (l.15), d’addition « Et » (l.16, 17, 21, 23), d’opposition « Mais » (l.21), de but « Afin » (l.24) :
- Champ lexi­cal de la reine : « La reine (l.13, 19, cette prin­cesse (l.13) ».
- Elle appré­cie son sta­tut, comme le prouve l’hyperbole : « Une grande dou­ceur à régner » (l.19 – 20).
- Elle est une dis­si­mu­la­trice, comme le prouve l’emploi du verbe : « Semblait » (l.20)
● l.24 à 28 : L’attrait d’Henri II pour les « Femmes » (l.25), et pour la beau­té repré­sen­tée par l’hyperbole : « Ce qu’il y avait de plus beau et de mieux fait » (l.26 – 27), et sou­li­gné par le connec­teur logique d’addition « Et » (l.27).
● l.29 à 38 : La splen­deur de la cour d’Henri II, sou­li­gnée par les connec­teurs logiques d’addition « Et » (l.30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37), d’opposition « Mais » (l.36) :
- Champ lexi­cal de la beau­té : « Belles (l.29), bien faits (l.30), beau (l.31), belle, majes­tueuse (l.36) ».
- Champ lexi­cal de la plus haute noblesse, grâce à une majo­ri­té d’hyperboles : « Les plus grandes prin­cesses (l.31), les plus grands princes (l.32), reine, Madame, sœur du roi (l.32), roi François (l.33), roi son fils (l.35), cour (l.36), le nombre infi­ni de princes et de grands sei­gneurs d’un mérite extra­or­di­naire (l.37 – 38) ».
- Champ lexi­cal des arts : « Vers, comé­die, musique (l.33), poé­sie, lettres (l.34) ».
═► Le texte s’articule en cinq par­ties, comme un sché­ma nar­ra­tif, mais aussi comme une tra­gé­die, ce qui pour­rait indi­quer que le des­tin de l’héroïne épo­nyme, qui n’apparaît pas dans le pas­sage, va être tragique.

Madame de La Fayette pré­sente, dès le début du roman, des per­son­nages his­to­riques, qui donnent cepen­dant sa teinte à l’oeuvre, et elle les met en exergue grâce à la struc­ture rigou­reuse du passage.

En conclu­sion, le cadre spatio-temporel, accom­pa­gné de l’intrigue, sou­ligne bien la pré­sence des plu­sieurs per­son­nages. Ce pas­sage est repré­sen­ta­tif d’un inci­pit sus­pen­sif, car les ren­sei­gne­ments prin­ci­paux, à savoir la pré­sen­ta­tion des héros prin­ci­paux, la Princesse de Clèves, le Duc de Nemours, et le prince de Clèves est absente.
Il est cepen­dant inté­res­sant de noter que la liai­son entre le roi et Diane de Poitiers est le néga­tif de celle qui unira, sans les unir, Monsieur de Nemours et la Princesse de Clèves.

Source : http://les-seconde11.over-blog.com/article-exemple-de-commentaire-compose-plan-detaille-partie-n‑2 – 66102605.html

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