Marivaux – Les Fausses confidences – schémas actanciel et dramatique

Temps de lec­ture : 3 minutes

Le sché­ma actanciel

Il fait appa­raître les res­sorts qui sou­tiennent la struc­ture de l’intrigue. Toute l’action s’organise autour de l’amour de Dorante pour Araminte qu’il sou­haite épou­ser : pour la conqué­rir, il est entré à son ser­vice comme inten­dant. Mais cet objec­tif se heurte à de nom­breux oppo­sants, car un autre pré­ten­dant est sur les rangs, le comte Dorimont, qui a les faveurs de la mère d’Araminte, Madame Argante (elle ver­rait d’un bon œil sa fille deve­nir com­tesse), de Marton, par inté­rêt, sur­tout, à l’oncle de Dorante, mon­sieur Remy, pro­cu­reur d’Araminte : il fait tout pour qu’un mariage soit pos­sible entre son neveu et la sui­vante d’Araminte, Marton, qui accueille avec joie ce pro­jet. Mais la prin­ci­pale oppo­si­tion vient d’Araminte elle-même, car l’écart social entre elle et Dorante fait de cet amour une véri­table trans­gres­sion, que son amour-propre ne peut que frei­ner. L’enjeu de l’intrigue est donc posé : com­ment à la fois sup­pri­mer ces oppo­sants, et convaincre Araminte d’accepter ses propres sentiments ?

C’est à cela que va s’employer l’ad­ju­vant, Dubois, ancien valet de Dorante entré au ser­vice d’Araminte, qui affirme sa force d’action : « Si vous lui plai­sez, elle en sera si hon­teuse, elle se débat­tra tant, elle devien­dra si faible, qu’elle ne pour­ra se sou­te­nir qu’en épou­sant » (I, 2). Pour réus­sir, il s’app­puie sur le valet Arlequin, mani­pu­lé à son insu, mais, sur­tout, sur le retour­ne­ment de Monsieur Remy qui, dès la scène 5 de l’acte III, réagit fort mal au mépris de Madame Argante et se met à défendre son neveu, puis sur celui de Marton, qui recon­naît, à la scène 10, l’amour sin­cère de Dorante pour sa maî­tresse et l’encourage à y répondre. Ces deux oppo­sants deve­nus des adju­vants, dès le moment où Araminte, à son tour, laisse par­ler son cœur, la comé­die peut se conclure, comme le veut la tra­di­tion, par un heu­reux mariage.

le sché­ma dramatique

L’exposition
Elle est très rapide : dans la scène 2, le public est infor­mé du « pro­jet » qui unit Dubois et Dorante pour per­mettre à celui-ci son mariage avec Araminte.

Le nœud de l’action
En 3 temps, les scènes sui­vantes déter­minent les rela­tions ini­tiales entre les per­son­nages.
D’abord, dans le plan de Dubois figu­rait un conseil à Dorante, « tâchez que Marton prenne un peu de goût pour vous », sans doute pour qu’elle encou­rage sa maî­tresse à sou­te­nir, par sym­pa­thie, le pro­jet de Dorante. Mais l’intervention de M. Remy, qui sou­haite marier son neveu à Marton, consti­tue un nou­vel élé­ment propre à faire avan­cer l’action, que Dubois saura par­fai­te­ment exploi­ter.
Puis vient l’introduction de Dorante auprès d’Araminte, qui construit en même temps sa rela­tion avec elle, avec Marton et avec Arlequin, mis à son ser­vice.
Enfin, est posé un der­nier enjeu de l’action, le pro­cès, qui défi­nit les oppo­sants, autour du Comte, rival de Dorante.

Les péripéties
​Préparées par Dubois, elles s’organisent autour de 3 péri­pé­ties, autant d’épreuves impo­sées à Araminte, qui se suc­cèdent rapi­de­ment, deux dans l’acte II, la der­nière au début de l’acte III : le por­trait d’Araminte, peint par Dorante, le rap­port d’Arlequin sur le tableau de celle-ci qu’il contemple, la lettre pré­ten­du­ment écrite par Dorante à un ami.
Dans cha­cune, le rôle de Dubois reste dis­si­mu­lé, ce qui per­met, paral­lè­le­ment, ses 3 « confi­dences » à Araminte : elles influent sur les réac­tions de celle-ci, aussi bien face à Dorante que face aux dif­fé­rents oppo­sants, inter­ve­nant à deux reprises.

L’élément de réso­lu­tion
C’est, jointe au retour­ne­ment de deux oppo­sants, M. Remy et Marton, l’ultime confi­dence de Dubois, qui, en accen­tuant la colère d’Araminte, intro­duit l’élément de réso­lu­tion : elle décide d’écouter ses propres sen­ti­ments. Nous recon­nais­sons là le gout de Marivaux pour l’analyse de la com­plexi­té de l’âme féminine.

Le dénoue­ment
Il est annon­cé dès l’ex­po­si­tion par l’emploi du futur de cer­ti­tude, « on vous épou­se­ra, toute fière qu’on est », d’où son extrême rapi­di­té. L’aveu d’amour d’Araminte, dans l’avant-dernière scène, déter­mine l’aveu par Dorante de la stra­té­gie menée : « Tous les inci­dents qui sont arri­vés partent de l’industrie d’un domes­tique qui savait mon amour, qui m’en plaint, qui, par le charme de l’espérance, du plai­sir de vous voir, m’a, pour ainsi dire, forcé de consen­tir à son stra­ta­gème. » Après le par­don accor­dée par Araminte à Dorante, il ne reste plus que le retrait du Comte et de Mme Argante pour conclure sur un heu­reux mariage, confir­mé par les deux der­nières répliques, long­temps sup­pri­mées, depuis 1793, à la Comédie-Française, mais réta­blies aujourd’hui :

le triomphe de Dubois avait l’inconvénient de mettre l’accent sur le stra­ta­gème plus que sur la véri­té du cœur :
la phrase d’Arlequin, « Pardi ! nous nous sou­cions bien de ton tableau à pré­sent ! L’original nous en four­ni­ra bien d’autres copies. », heur­tait, elle, les bien­séances en évo­quant la rela­tion sexuelle du couple.

Source : cotentinghislaine

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