Penser la décroissance

Temps de lec­ture : 2 minutes

Face aux alertes des scien­ti­fiques dans les années 1970, l’économie éco­lo­gique se déve­loppe : ses par­ti­sans veulent sor­tir d’une approche exclu­si­ve­ment éco­no­mé­trique et mathé­ma­tique et réclament la jus­tice cli­ma­tique et sociale. Jusqu’à la décroissance ?

Dans La décrois­sance, Entropie – Ecologie – Economie (1979), Nicholas Georgescu-Roegen inter­roge la notion de pro­duc­tion et s’insurge contre cette concep­tua­li­sa­tion abs­traite et méca­niste des acti­vi­tés maté­rielles de l’homme : « Toute l’histoire éco­no­mique de l’humanité prouve sans contre­dit que la nature elle aussi joue un rôle impor­tant dans le pro­ces­sus éco­no­mique, ainsi que dans la for­ma­tion de la valeur éco­no­mique. Il est grand temps, me semble-t-il, d’accepter ce fait et de consi­dé­rer ses consé­quences pour la pro­blé­ma­tique éco­no­mique de l’humanité ».

Considérer la matière entraîne l’in­ter­ro­ga­tion du but même de l’é­co­no­mie. Pour Nicholas Georgescu-Roegen, notam­ment, ce qu’il ne faut pas oublier, ce sont les rela­tions maté­rielles qui sous-tendent les rela­tions éco­no­miques. Les rela­tions d’é­change, vues par le prisme des prix, doivent être appré­hen­dées comme des rela­tions de trans­for­ma­tion de la matière. Si l’on fait cela, on réin­sère l’é­co­no­mie dans les pro­ces­sus phy­siques : elle n’est plus une sphère auto­nome en sur­plomb de la réa­li­té phy­sique. – Antonin Pottier

Dans les années 1960 et 1970, en effet, la mobi­li­sa­tion des scien­ti­fiques pour aler­ter sur la situa­tion envi­ron­ne­men­tale est large : ils sonnent l’alerte, c’est le moment de l’invention de l’« envi­ron­ne­ment » tel que nous l’entendons aujourd’hui. L’économie envi­ron­ne­men­tale se déve­loppe : elle s’intéresse de plus en plus à la ques­tion du cli­mat et de la pol­lu­tion, alors que jusqu’à pré­sent les éco­no­mistes qui s’intéressaient à l’environnement s’é­taient seule­ment inter­ro­gés sur la ques­tion de la fini­tude des ressources.

L’économie éco­lo­gique, elle, va plus loin : son approche se veut plu­ri­dis­ci­pli­naire et, au-delà du cal­cul du coût éco­no­mique du chan­ge­ment cli­ma­tique, elle défend un déve­lop­pe­ment durable de la socié­té. Dans la lignée de Nicholas Georgescu-Roegen, elle insiste sur les mesures phy­siques des phé­no­mènes et renou­velle l’analyse éco­no­mique de la Nature. Plus tard, dans les années 2000, le terme de « décrois­sance » appa­raît éga­le­ment dans le débat éco­no­mique et social : c’est un pro­jet éco­no­mique qui pose la ques­tion de l’état sta­tion­naire de la crois­sance et de la taille opti­male de l’économie, mais éga­le­ment un pro­jet poli­tique et de jus­tice sociale.

L’idée de la décrois­sance c’est de faire contre­pied au concept de déve­lop­pe­ment durable. Le déve­lop­pe­ment durable, c’est l’i­dée, sans remettre en ques­tion la pos­si­bi­li­té de vie digne des géné­ra­tions futures, de per­pé­tuer la crois­sance. La force du mot « décrois­sance » réside dans le fait qu’on n’a jamais pu vider le mot de son sens et de sa sub­stance. – Vincent Liegey

Et si vous chan­giez d’air ?

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