L’Abbé Prévost a publié “Manon Lescaut” en 1731, une époque où les idées révo­lu­tion­naires n’a­vaient pas encore émer­gé. Par consé­quent, il est dif­fi­cile de consi­dé­rer cette œuvre comme révo­lu­tion­naire en ce sens. Cependant, “Manon Lescaut” a été consi­dé­rée comme un roman impor­tant dans l’his­toire de la lit­té­ra­ture fran­çaise pour plu­sieurs rai­sons. Tout d’a­bord, l’œuvre a été l’un des pre­miers romans à uti­li­ser la pre­mière per­sonne comme point de vue nar­ra­tif, ce qui a per­mis aux lec­teurs de mieux com­prendre les pen­sées et les moti­va­tions du per­son­nage prin­ci­pal. En outre, le roman a été l’un des pre­miers à uti­li­ser la forme épis­to­laire, où les personnages…

Le début du roman est placé sous le signe de l’argent. Dans le court pro­logue que prend en charge l’homme de qua­li­té, le récit place l’argent au cœur de la pre­mière ren­contre à Pacy de Renoncour et de DG. Celui-ci a besoin d’argent pour ache­ter les gardes de Manon : « Ma bourse s’est épui­sée en peu de temps et je suis sans le sou, ils ont la bar­ba­rie de me repous­ser bru­ta­le­ment lorsque je fais un pas vers elle. »D’entrée, le roman impose ce thème dans toute sa vio­lence : l’aventure amou­reuse est liée à une quête finan­cière, l’amant est un héros dégra­dé, réduit à acheter…

À la fois nar­ra­teur et per­son­nage, le sujet de l’action est le che­va­lier des Grieux, épris de pas­sion pour Manon, objet de désir au pre­mier regard. S’il sou­haite l’épouser, ce but est rapi­de­ment oublié : « « Nous frau­dâmes les droits de l’Église ». Ce n’est que dans la seconde par­tie, à la Nouvelle-Orléans, qu’il revient à son pro­jet de mariage. Les opposantsLes oppo­sants sont d’abord le père de des Grieux, qui ne peut accep­ter une mésal­liance, puis les amants de Manon : M. de B…, le riche fer­mier géné­ral, puis le vieux M. de G…M…, et son fils, enfin Synnelet, le neveu du…

Le sous-texte déiste de Manon Lescaut, appa­raît lorsqu’on étu­die la vie de Manon. Elle est envoyée au couvent mal­gré elle. Il n’y a pas de doute sur son manque de voca­tion. « Elle meré­pon­dit ingé­nu­ment, qu’elle y était envoyée par ses parents, pour être reli­gieuse. […] [E]lle nepré­voyait que trop qu’elle allait être mal­heu­reuse, mais que c’était appa­rem­ment la volon­té duCiel, puisqu’il ne lui lais­sait nul moyen de l’éviter »139. La même ques­tion se pose pour Des Grieux ; a‑t‑il choi­si la voie ecclé­sias­tique par voca­tion ou plu­tôt par devoir ? Le che­va­lier raconte :[J]’ai l’humeur natu­rel­le­ment douce et tran­quille : je m’appliquait à…

Deuxième séjour en pri­son pour Des Grieux. Visite de son père. I. Différentes tona­li­tés au ser­vice d’une scène roma­nesque et théâ­trale à la fois – La théâ­tra­li­té de la scène tient essen­tiel­le­ment à l’importance du dis­cours direct dans ce pas­sage : deux tirades se suc­cèdent, celle du père puis celle du fils. Quelques mou­ve­ments : “j’allai l’embrasser”, “il s’assit”. Huis-clos : chambre de la pri­son (et non cel­lule puisque Des Grieux est un gen­til­homme). – Une scène de retrou­vailles pathé­tique et tra­gique : le père rend visite à son fils en pri­son, alors qu’il l’a mis en garde maintes fois contre Manon et sa…